Mondial: Hakimi, le gamin de Madrid devenu fossoyeur de l'Espagne

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Achraf Hakimi (C) célèbre avec ses coéquipiers après avoir converti le dernier penalty lors de la séance de tirs au but pour remporter le match de football des huitièmes de finale de la Coupe du monde Qatar 2022 entre le Maroc et l'Espagne au stade Education City à Al-Rayyan, à l'ouest de Doha, le 6 décembre 2022. (Photo par JAVIER SORIANO / AFP)

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Badr Benoun rate son penalty, mais il ne savait pas encore que quelque part il était la main de Dieu. Le gardien Bounou qui avait déjà stoppé deux buts auparavant entre dans les bois pour en arrêter un troisième. Les Lions de l’Atlas menaient déjà par 2 à 0. Pointe Achraf Hakimi qui avait le but décisif dans les pieds qui allaient envoyer la Maroc en quart de finale. Il ne tergiverse ou s’agite pas comme le brésilien Neymar face à la Croatie. Il regarde le ballon, jette un regard sur la cage et tranquillement, comme s’il était en promenade, il envoie une panenka. Il fallait de l’audace et du culot pour mettre la balle juste là où se tient le gardien de but. La main de Dieu dans les pieds de Benoun ? C’est elle qui a voulu que ce soit son but qui envoie les Marocains en quart et non pas l’arrêt du troisième pénalty espagnol par le prodigieux Yassine Bounou.  

Sans états d'âme: né et élevé en banlieue pauvre de Madrid, le latéral Achraf Hakimi a réussi mardi son tir au but décisif pour hisser le Maroc pour la première fois en quarts de finale de la Coupe du monde, et sortir l'Espagne, son pays où ses parents ont trimé pour le faire grandir.

Cela fait près de trois heures que le coup d'envoi du derby électrique a été donné, quand Achraf Hakimi expire une dernière fois, s'élance, et loge le ballon à gauche d'Unai Simon d'une subtile panenka, faisant exploser le Stade Education City tout acquis au Maroc.

Un tir au but entré immédiatement dans l'histoire du football marocain. "On mérite d'écrire cette page d'histoire", avait prévu le latéral du Paris Saint-Germain en conférence de presse, jeudi, après la victoire 2-1 face au Canada et la qualification pour les huitièmes.

"Réussir quelque chose de grand avec votre pays, c'est mieux qu'avec votre club. Jeune, j'ai vu la dernière génération qui avait disputé la Coupe du monde, et j'ai rêvé de devenir comme eux", avait-il glissé.

En deuxième période, avant de remettre un ballon en jeu après une touche, on l'a vu sourire aux petits mots de Luis Enrique, le sélectionneur espagnol, venu lui donner une tape amicale.

Mais ne vous fiez pas à ce sourire ravageur. Ce tir au but, certain voudraient le faire passer pout ‘’un coup de poignard’’ dans le dos de son "deuxième pays", sans parler des conditions sociales et culturelles, pour ne pas parler d’autre chose dans lesquelles il a grandi..

Son "deuxième pays"

Son père Hassan (51 ans) avait averti qu’il n’y avait pas match : "L'Espagne, c'est son deuxième pays, sa maison. C'est la première maison contre la deuxième", a-t-il soufflé, tout sourire, la veille du match.

Fils d'une femme de ménage et d'un vendeur ambulant, tous deux Marocains et installés en Espagne depuis les années 1980, Achraf Hakimi est né à Getafe (banlieue pauvre sud de Madrid), dans le quartier de Las Margaritas.

Parfait hispanophone, marié à une actrice espagnole d’origine tunisienne (Hiba Abouk), Hakimi a débuté le football à Ofigevi, puis a vite rejoint le centre de formation du Real Madrid, là où il a fait toutes ses classes. Ensuite, ç'a été Dortmund, l'Inter Milan, puis le PSG.

Il est même brièvement passé par la sélection espagnole chez les jeunes, mais a vite remarqué que ce n'était pas "l'endroit adéquat" pour lui: "Je ne me sentais pas chez moi", a confié le joueur lundi dans un entretien à Marca, le journal sportif le plus vendu d'Espagne.

Maroc - Espagne, était-ce le match le plus spécial à ses yeux ? "Non. Ce sera la finale", avait prévenu Hakimi dans Marca.

Promesse tenue. Mardi, avec son pénalty, il n'a pas éliminé qu'un pays. Il a aussi enterré les espoirs de ses deux comparses du PSG Pablo Sarabia et Carlos Soler, premiers tireurs pour la Roja et qui ont tous deux failli (Sarabia sur le poteau, Soler stoppé par Yassine Bounou). Et ceux d'ex-équipiers ou amis croisés au Real, comme Marco Asensio.

En guise de célébration, Hakimi a décoché un sourire, et un pas de danse enfantin, imitant un pingouin. Le gamin de Madrid n'a que 24 ans, mais a déjà écrit l'histoire de sa sélection. (Quid avec AFP)

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