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Présidentielle argentine : la campagne électorale s’enfièvre - Rachid MAMOUNI

La hiérarchie des candidats dégagée par les résultats des primaires met en tête un outsider, Javier Milei, gagnant ou écarté du ballotage le 19 novembre, son nom et son style auront marqué une rupture dans la manière de faire la politique en Argentine
Rachid MAMOUNI (Pole Amérique du Sud de MAP)
Buenos Aires - A l’approche des élections présidentielles du 22 octobre prochain en Argentine, la campagne électorale bat son plein, avec un flot ininterrompu d’initiatives et de propositions et des échanges verbaux qui frisent l’invective.
Le premier tour va mettre aux prises les cinq candidats qui ont obtenu le seuil minimum lors des élections primaires obligatoires, mais le peloton de tête est composé de trois personnalités, dont deux seulement pourront disputer le deuxième tour prévu le 19 novembre prochain.
La hiérarchie des candidats dégagée par les résultats des primaires met en tête un outsider, Javier Milei, suivi de la candidate de l’opposition du centre-droit, Patricia Bullrich, et enfin le candidat de la majorité et ministre de l’économie sortant, Sergio Massa.
Milei, qui était arrivé en tête des primaires avec presque 30% des voix, a imprimé une touche déroutante à la campagne électorale.
Ses propositions de dollarisation de l’économie, de la fermeture de la Banque centrale ou de la réduction drastique du nombre des départements ministériels ont fini par déconcerter adversaires et observateurs.
Un épisode rocambolesque, dont le héros n’est autre que Milei, a dévoilé le caractère inédit, extravagant et fantasque de cette campagne électorale.
Le candidat a été filmé la semaine dernière, au milieu de ses nombreux partisans, brandissant une tronçonneuse vrombissante et criant à gorge déployée que son objectif est d’en finir avec « la caste » politique qui a gouverné le pays jusqu’à présent.
Certes, le « phénomène » Milei attire l’attention des médias en Argentine et ailleurs, mais de nombreux économistes du pays estiment que son agenda économique est inapplicable et ses méthodes sont "dangereuses" pour la démocratie en Argentine.
Son Adversaire immédiate est Patricia Bullrich, avec laquelle il partage le même vivier des électeurs de droite issus de la classe moyenne et désireux d’un changement d’orientation politique en Argentine.
Dans ses critiques contre Milei, Bullrich n’y va pas avec le dos de la cuillère. Elle l’assimile à la « caste » qu’il prétend combattre et l’accuse de nouer des accords avec des syndicalistes pour une distribution des postes dans un éventuel gouvernement.
Bullrich épingle également les "fortes contradictions" qui caractérisent les idées de cet économiste, tout en misant sur une partie de ses électeurs qu’elle considère moins radicaux et qui, une fois aux urnes, finiraient par l’abandonner.
La candidate de la coalition du centre-droit « Ensemble pour le changement », dont le chef de file est l’ancien président Mauricio Macri (2015-2019), montre encore plus d’aplomb contre le ministre sortant de l’économie.
Elle reproche à Massa sa grande proximité avec le secteur le plus radical du mouvement peroniste et épingle ses dernières décisions « populistes » destinées à gagner des voix à tout-va.
Avec sa double casquette de candidat présidentiel et ministre de l’économie, Sergio Massa se sent moins contrarié d’annoncer des décisions d’allègement de l’impôt sur le revenu et des subventions sociales en faveur des retraités et de l’immense majorité des salariés.
Les petites et moyennes entreprises ainsi que les travailleurs autonomes ont eu leur lot d’avantages fiscaux.
Massa, qui a mis le turbo à ses annonces économiques et sociales et parcouru le pays à la recherche de soutiens pour son projet, s’est montré plus mordant à l’égard de Milei.
Lundi, lors d’une cérémonie dédiée au système de santé, il ne s’est pas empêché de commenter l’épisode de la tronçonneuse que Milei utilise pour signifier sa détermination à opérer des coupes sévères dans le budget de l’Etat.
« Imaginez si votre médecin arrive avec une tronçonneuse à la main !», a-t-il lancé devant un auditoire hilare.
Autant pour Massa que pour Bullrich, l’identité de l’adversaire à abattre au premier tour ne fait aucun doute : Javier Milei.
En barrant la route à cet outsider encombrant pour l’empêcher d’atteindre le second tour, les deux candidats de l’opposition et de la majorité espèrent avoir plus de chance de l’emporter au sprint final.
Toutefois, Milei ne cesse de répéter à tous ses meetings qu’il va l’emporter dès le premier tour grâce à un élan de soutien à travers tout le pays.
Que Milei l’emporte le 22 octobre, ou qu’il soit écarté du ballotage le 19 novembre, ce qui est certain est que son nom et son style auront marqué à jamais une rupture dans la manière de faire la politique en Argentine.