10.000 viols et 7.000 meurtres en 3 mois, L'Afrique du Sud en guerre contre elle-même - Par Hamid AQERROUT

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‘’Nous pleurons notre pays aimé’’ dit une pancarte, tandis que l’autre demande que l’on ‘’arrête de violer et de tuer nos femmes et nos enfants’’

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Par Hamid AQERROUT ( Bureau de la MAP à Johannesburg).

Johannesburg, 25/11/2022 -(MAP)- Juste un jour avant le lancement, ce vendredi, de la campagne mondiale des 16 jours d'activisme contre la violence basée sur le genre, des statistiques sur la criminalité en Afrique du Sud donnent froid au dos et brossent un tableau sombre de la société sud-africaine.

Plus de 10.000 viols et 7004 meurtres ont été signalés en seulement trois mois, de juillet à septembre de cette année, ce qui se traduit par une moyenne de 109 viols par jour, donnant une image troublante de la criminalité qui sévit dans le pays arc-en-ciel.

Ces statistiques choquantes publiées, mercredi par le ministre de la police, Bheki Cele, ont également révélé que sur les cas de viol examinés, 5.083 s'étaient produits au domicile de la victime ou de l'agresseur, alors que 1.651 viols ont eu lieu dans des lieux publics, tels que des rues, des parcs et des plages. De surcroit, plus de 13.000 femmes auraient été victimes d'agressions avec intention de causer des lésions corporelles graves.

Ainsi, le rythme auquel les sud-africaines sont maltraitées, violées et certaines tuées reste préoccupant et inacceptable.

Ces violences faites aux femmes ont provoqué l’indignation des ONG et des partis de l’opposition qui reprochent au gouvernement sont laxisme devant la recrudescence de la criminalité dans le pays.

Des militants affirment que ces statistiques prouvent de façon on ne peut plus claire que les deux sommets présidentiels tenus sur la violence sexiste et le féminicide n’ont pas donné de résultats. «Ces chiffres révèlent que ce qui a été décidé lors des deux conférences convoquées par la Présidence sud-africaine pour lutter contre la VBG n'a malheureusement pas été mis en œuvre et demeure, encore une fois, de vœux pieux», a déclaré Sihle Sibisi, fondateur de la Fondation Kwanele.

Ces chiffres sur la criminalité, note-t-il, «montrent à nouveau que nous, en tant que communautés, continuons de ne pas protéger certains des plus vulnérables de la société», précisant que 315 garçons et filles âgés de 0 à 17 ans ont été tués au cours des trois mois sous revue.

D’autres militants pensent que ces statistiques ne reflétaient pas fidèlement les niveaux élevés de la criminalité dans le pays. «C'est un euphémisme car nous savons que les cas de viol sont sous-déclarés», a déclaré Brenda Snyders, directrice du Programme d'appui au développement rural, arguant que «l'année dernière, nous avons fait une enquête dans cinq villes de Witzenberg (Cap occidental) et l'échantillon que nous avons pris a révélé que 98 % des femmes avaient été victimes de violence».

Elle a expliqué que la majorité des victimes ne voulait pas porter plainte soit en raison de l'attitude de la police, soit parce que l'agresseur est un membre de la famille.

Pour sa part, la porte-parole de l’Association «People Opposing Women Abuse», Thandiwe McCloy, a indiqué que certains cas de violences basées sur le genre ne sont pas signalés pour diverses raisons, notamment la peur de nouveaux abus ou parce que les familles dépendent financièrement des agresseurs.

L'assaut des crimes violents qui affligent l'Afrique du Sud ne montre donc aucun signe de ralentissement. D’aucuns déplorent que les violences sexistes, le fémicide et les enlèvements, qui ont doublé pour atteindre plus de 4 000 personnes au cours des trois mois concernés, sont le pire des pandémies que le pays a connues.

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