La reconstruction des zones sinistrées : un chantier titanesque - Par Abdeslam Seddiki

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Cette image est tirée d’une collection d’images montrant comment l’Intelligence Artificielle a rêvé la reconstruction des zones rasées par le séisme du 8 septembre 2023. La même IA explique que le rêve éveillé peut souvent, comme un rêve pendant le sommeil, avoir une sorte de narration ou de scénario, bien qu’il puisse être plus cohérent ou contrôlable. Plus réaliste aussi

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2022, pas que du bonheur - Par Abdeslam Seddiki

Le chantier de la reconstruction des zones frappées par le séisme d’Al Haouz est désormais ouvert. La réunion présidée par SM Le Roi le 14 septembre dernier  en a tracé les grandes lignes notamment au niveau du relogement des populations concernées.

 On rappellera, qu’il est prévu à cet effet, une aide financière directe de 140.000 dirhams pour les logements totalement effondrés et de 80.000 dirhams pour couvrir les travaux de réhabilitation des habitations partiellement effondrées. Au total, d’après les premières estimations, ce sont 50 000 logements qui seraient concernés. Mais auparavant, il faudrait procéder, comme cela a été précisé par le communiqué issu du Cabinet Royal, à des opérations d’expertise et de stabilisation des terrains.

Toutefois, le relogement n’est qu’une partie de la reconstruction qui embrasse d’autres aspects absolument nécessaires pour créer un environnement viable et un cadre propice à la vie des citoyens et à la reprise de l’activité.  C’est dire qu’il s’agit d’un chantier titanesque dont personne n’oserait pour le moment estimer le coût, fut-ce approximatif. Les données disponibles à l’heure actuelle demeurent encore partielles et imprécises. Il faudra du temps pour évaluer toutes les pertes subies, mais surtout évaluer les besoins des populations concernées. On ne le dira jamais assez, la reconstruction ne saurait être réduite à une reproduction à l’identique du passé. C’est une action qui s’inscrit dans une dynamique socio-historique visant à corriger les insuffisances du passé et à rattraper le temps perdu en matière de développement pour une mise à niveau systémique de ces régions. C’est l’un des enseignements que l’on a tiré de toutes les expériences de reconstruction partout où elles se sont produites. 

Ces considérations méthodologiques préalables sont carrément mises de côté par certains médias habitués au « copier- coller » et certains commentateurs qui se sont autoproclamés des « experts » en la matière. Ainsi, sont-ils   allés vite en besogne en reprenant une estimation de la reconstruction imputable à l’Institut d’Etudes géologiques des Etats-Unis (USGS : United States Géologique Survey), sans se donner toutefois la peine d’aller vérifier à la source pour savoir de quoi il s’agit au juste.  Que dit USGS ? Il a fait une estimation grossière des pertes matérielles causées par le séisme allant de 1 à 10   MM $, soit 8% du PIB ! Telle que c’est annoncé, une telle estimation n’en est pas une dans les faits et ne revêt aucune valeur. D’ailleurs, on ne voit pas comment cet Institut aurait pu procéder à l’estimation des dégâts au lendemain du séisme ? (Les données ont été publiées sur le site le 9 septembre). Et si nos commentateurs s’étaient donné la peine de vérifier l’information, ils auraient pu s’en rendre compte en lisant l’indication suivante en haut de la page « The data below have NOT been reviewed by a scientist ». (Les données ci-dessous n’ont pas été examinées par un scientifique, ce qui signifie qu’elles n’ont pas été validées). Dans tous les cas, on ne fait jamais une estimation avec une « marge » de 1 à 10 ! 

Ce travail d’estimation des pertes et des coûts de la reconstruction est en cours.  On aura les résultats dans les prochains jours. Si les pertes sont faciles à recenser, les coûts de la reconstruction nécessitent, par contre, des études préalables et des arbitrages incontournables portant sur le type de logements à construire, les infrastructures à bâtir, l’activité à développer…  De tels arbitrages doivent être fondés sur des critères objectifs et faire l’objet de concertations démocratiques avec les personnes concernées. Comme il a été mentionné auparavant, les coûts de la reconstruction seraient par définition supérieurs aux dégâts et pertes subies, mises à part les pertes humaines qui « n’ont pas de prix ».  La reconstruction de cette région, figurant parmi les plus pauvres du pays en termes de PIB par habitant et d’IDH (indice de développement humain), est une occasion pour réparer tous   les préjudices infligés à cette population au cours des décennies. C’est une occasion pour l’intégrer dans la dynamique que connait notre pays économiquement, socialement et culturellement. C’est le moment idoine de faire de ce malheur qui nous a tous touché en tant que Marocains, une opportunité pour se pencher sérieusement sur la situation des populations démunies et marginalisées, les faire participer au développement du pays et les faire bénéficier de ses richesses. L’élan de solidarité que connait notre pays pour venir en aide à nos concitoyens dans les régions sinistrées ne doit pas s’arrêter. Il faut l’institutionnaliser à travers   la mise en œuvre des politiques publiques appropriées.   

Pour l’heure, enregistrons avec satisfaction le déroulement de l’opération de solidarité notamment à travers les dons au « Fonds spécial pour la gestion des effets du séisme ». Avec la même ferveur nous apprenons la bonne nouvelle de la reprise des cours dans ces régions impactées par le séisme en dressant des tentes comme salles de classe et en transférant un certain nombre d’écoliers vers Marrakech.  C’est le meilleur moyen pour continuer de vivre, fut-ce dans la souffrance ! En attendant des jours meilleurs.

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