… Que ma mort soit un conte - Par Mohamed Chraibi

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Si je dois mourir / Tu dois vivre pour / Pour conter mon histoire - Refaat Alareer, poète palestinien, a été tué avec sa famille après des frappes meurtrières dans le nord de la bande de

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Le poète et professeur d'université (Gaza, Londres et Malaisie) palestinien, Refaat Alareer a été tué dans une frappe israélienne le 6 décembre dernier à Gaza. Son dernier poème écrit en anglais et publié un mois auparavant porte le titre prémonitoire: " if I must die". Ci-Après, je reproduis le texte original assorti d’une traduction et de mon interprétation personnelles. Ce faisant, j'aimerais convoyer aux lecteurs les images bouleversantes que ce texte a produites en moi. 

If I must die

You must live To tell m'y story

To sell my things 

To buy a piece of cloth

And some strings

(Make it White with a long tail)

So that a child, somewhere in Gaza

While looking the heaven in the eye

Awaiting his Dad who left in a blaze

And bid no one farewell

Not even to his flesh

Not even to himself

Sees the kite, the kite you made, flying up above

And thinks for a moment an angel is there

Bringing back love

If I must die

Let bring hope

Let it be a tale

****

Si je dois mourir
Tu dois vivre pour
Pour conter mon histoire
Pour vendre mes effets
Et acheter un morceau de tissus
Et quelques rubans
(Achète le blanc avec une longue traine)
De sorte qu’un enfant, quelque part à Gaza
Scrutant le ciel
D’où reviendrait son père, disparu dans un embrasement
Sans dire adieu à personne
Pas même à sa chair
Pas même à lui-même
Il voit le cerf-volant, mon cerf-volant que tu fis de moi
Planant au dessus de lui
Et il croit, un instant,  qu’un ange est là
qui ramène l’amour sur terre
Si je dois mourir,
qu’il apporte l’espoir
Que ma mort soit un conte

Ma traduction n'a pas la prétention de refléter les sentiments de l'auteur ni le sens que lui-même donne aux mots qu'il a choisis. Ce sont évidemment les miens. Je ne sais si je dois en demander pardon à son âme : je vois dans le cerf-volant le cadavre de l’auteur dans le linceul fait avec l’étoffe blanche et nouée au moyen des rubans qu’il demande qu’on achète en prévision de sa mort. Des cadavres dans des linceuls blancs noués au niveau du cou et des chevilles, j’en vois tous les jours dans les journaux que je consulte pour m'informer de ce qui se commet à Gaza. Mais l’image de l’un deux flottant dans le ciel (symbole de liberté́) est d’une beauté tragique que seule la poésie peut rendre. 

En tête des crimes dont Israël devra rendre compte un jour, les assassinats d’enfants et de poètes.

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