billet
La vieillesse est un naufrage
Je m’attendais à ce que le parti du progrès et du socialisme (PPS) légué par le défunt Ali Yata à ses camarades fête ses vingt ans de participation sans discontinuer au gouvernement. Successivement sous la direction du socialiste Abderrahmane Youssoufi, du respectable libéral Driss Jettou, de l’istiqlalien Abbas El Fassi, de l’islamiste Abdalilah Benkirane et enfin de l’autre islamiste Saâdeddine El Othmani. Pour d’anciens communistes, c’est un record, voire un exploit, auquel même le plus vieux parti du Maroc, l’Istiqlal, ne peut prétendre.
Mais non, avec deux mois de retard, ils fêtent le centenaire de la révolution d’octobre.
Pour comprendre l’évènement, il faut revenir sur les pérégrinations du PPS dans le labyrinthe des appellations et acronymes. Ils en disent long sur son parcours et sur sa capacité hors pair d’adaptation.Ses un pas en avant, deux pas en arrière.
En 1943 est fondé le parti communiste du Maroc sous la houlette de Léon Sultan, un communiste d’origine algérienne aux accointances sionistes. Son décès en 1945 permet à Ali Yatad’en saisir les rênes et restera aux commandes jusqu’à son décès en 1997. Très très proche du parti communiste français, pour ne pas dire inféodé, il est interdit une première fois sous le protectorat. Il le sera une deuxième fois après l’indépendance mais renaitra de ses cendres en 1968 en changeant son nom, parti communiste marocain, pour prendre celui de parti de libération et de socialisme qui agira plus tard dans une semi-clandestinité, après une troisième interdiction, sousle nom de partisans de libération et du socialisme. Il revient à la légalité sous le nom du PPS qu’il porte aujourd’hui encore.
Jusqu’à la chute du mur de Berlin et l’implosion par la suite de l’empire soviétique, la Mecque du PPS est la place rouge de Moscou. L’une des blagues, éculée je l’admets, voulait que quand il pleuvait sur la capitale soviétique, les camarades d’ici sortaient leurs parapluies.
Le retour sur ces détails de l’histoire, permet, donc, de mieux expliquer pourquoi et comment le parti de Nabil Benabdellah, rattrapé par ses démons bolchéviques, célèbre le centenaire de la révolution d’octobre, celle qui amena Lénine, ensuite Staline, puis les autres à la construction de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques.
Nostalgiques les camarades ? On les croyait pourtant guéris, mais avec eux se vérifie que l’axiome qui disait que « quand on n’est pas communiste à 18 ans, c’est qu’on n’a pas de cœur, quand on l’est encore à 40 ans c’est qu’on n’a pas de raison », s’applique parfaitement aux héritiers de Ali Yata. A 75 ans d’âge, le PPS vieillit mal et nous offre ainsi l’occasion de constater la véracité de l’aphorisme de Chateaubriand : La vieillesse est un naufrage.