Américains et Russes à l'aise à Genève, ''capitale de la paix'' ?

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Reagan et Gorbachtev, à Genève le 19 novembre 1985. le sommet où le detricotage de l’Union Soviétique et du Bloc de l’Est a commencé. Vladimir Poutine s’en souvient et sera certainement sur ses gardes quand il rencontrera ce lundi Joe Biden

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De Reagan-Gorbachtev à Biden-Poutine en passant par Kerry-Lavrov jusqu'aux pourparlers russo-américains de lundi, la "capitale de la paix" qu'est Genève reste un lieu privilégié des discussions entre les deux grandes puissances.

‘’Neutralité suisse’’

Second plus important siège de l'ONU, Genève, qui abrite les sièges de la Croix-Rouge et de dizaines d'organisations internationales, est souvent désignée comme la "capitale de la paix".

"Genève, ville de paix", la phrase du président suisse Guy Parmelin lors du sommet Biden-Poutine en juin 2021 a montré que le pays alpin, bien connu pour sa neutralité, pouvait toujours jouer un rôle dans les relations internationales même en pleine crise sanitaire qui a compliqué les rencontres entre grands dirigeants.

Lieu clé pour de nombreux pourparlers de paix, Genève, située sur les rives du lac Léman, est une ville dans laquelle Américains et Russes aiment se rencontrer.

C'est ici que les numéros un américain Ronald Reagan et soviétique Mikhaïl Gorbatchev eurent un échange historique en 1985, pendant la Guerre froide.

Experts et services secrets 

C'est à Genève que les Etats-Unis et la Russie ont négocié en 2009 et 2010 un nouvel accord de réduction de leurs arsenaux nucléaires, succédant à l'accord START I de 1991. Siège de la Conférence du désarmement, unique instance multilatérale de négociation dans le domaine du désarmement, Genève regorge d'experts qui permettent de mener de telles négociations.

La ville a également accueilli plusieurs rencontres entre les chefs de diplomatie russe américain, comme lors du sommet entre Hillary Clinton et Sergueï Lavrov en mars 2009. A cette occasion, la secrétaire d'Etat américaine lui avait offert un "bouton de remise à zéro" en plastique, pour symboliser la relance des relations.

Russes et Américains, qui disposent à Genève d'importantes représentations diplomatiques et de services de renseignement considérables, y ont également organisé ces dernières années plusieurs rencontres sur la Syrie.

Un attachement à Genève que Biden et Poutine ont confirmé en juin 2021. Depuis, leurs numéros 2 de la diplomatie enchaînent les rencontres dans la ville suisse, pour tenter de lisser les nombreux différends qui minent les relations bilatérales.

La secrétaire d'Etat adjointe américaine Wendy Sherman et le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov se sont ainsi rencontrés une première fois le 28 juillet à la Représentation permanente des Etats-Unis, avant de se retrouver le 30 septembre, à la Représentation russe.

Discrétion et sécurité 

Situés dans le quartier international de Genève, les deux imposants bâtiments se situent à quelques centaines de mètres l'un de l'autre, non loin du siège de l'ONU.

Le quartier sera placé sous haute sécurité, comme Genève en a l'habitude. La Suisse, et en particulier Genève, est d'ailleurs appréciée par les diplomates de tous bords pour sa flexibilité et sa discrétion en tant qu'Etat hôte, ainsi que pour la sécurité qu'elle offre.

Ce sont ces pourparlers qui, par exemple, ont abouti à un accord historique sur le nucléaire iranien en 2013 ou qui ont porté dans les années 1990 sur le conflit en Bosnie, et plus récemment, sur les conflits en Syrie, au Yémen et en Libye.

Dialogue américano-russe: cinq sujets qui fâchent

Une urgence : éviter un nouveau conflit en Ukraine. Mais aussi des préoccupations à plus long terme, comme la sécurité en Europe, le désarmement et le rétablissement de relations diplomatiques dignes de ce nom entre les Etats-Unis et la Russie.

Voici cinq sujets de friction avant leurs pourparlers à Genève:

L'Ukraine

Les Occidentaux accusent la Russie d'avoir déployé jusqu'à 100.000 soldats à la frontière avec l'Ukraine, et menacent de sanctions inédites en cas de nouvelle invasion, après l'annexion de la Crimée en 2014.

Washington et les Européens veulent un retrait de ces troupes, et une relance des accords de Minsk.

Moscou demande de son côté la fin de l'élargissement de l'Otan à ses portes et une diminution des effectifs militaires de l'Alliance en Europe de l'Est.

Autres points chauds

Les Etats-Unis ont critiqué le déploiement de troupes russes en soutien au pouvoir du Kazakhstan confronté à des émeutes, après avoir déjà mis en cause le soutien apporté par la Russie au président du Bélarus Alexandre Loukachenko après sa réélection contestée et dans la récente crise des migrants avec l'Europe.

L'appui déterminant de Moscou au président syrien Bachar al-Assad reste aussi un sujet de désaccord.

En Afrique, Etats-Unis et Union européenne font pression pour réduire le rôle du sulfureux groupe paramilitaire russe Wagner, accusé de violations des droits humains en Libye et en Centrafrique et qui pourrait débarquer au Mali.

Désarmement

L'objectif premier du "dialogue sur la stabilité stratégique" prévu lundi à Genève est notamment de relancer les discussions sur le contrôle des armements entre les deux puissances atomiques.

Après l'accord conclu il y a un an pour prolonger de cinq ans le traité New Start de limitation des arsenaux nucléaires, Washington s'est dit prêt à d'autres mesures -- à condition que Moscou retire d'abord ses troupes de la frontière ukrainienne.

A ce dossier classique est venu se greffer celui des cyberattaques reprochées par les Américains aux Russes, sur fond de désinformation en ligne et d'accusations d'ingérence électorale.

La querelle des ambassades

Les effectifs diplomatiques respectifs des deux pays sont au plus bas, après une série d'expulsions et de mesures de rétorsions. A tel point que les Américains préviennent que leur ambassade à Moscou pourrait tout simplement ne plus être en mesure de fonctionner cette année.

Le sujet fait l'objet de négociations depuis plusieurs mois, mais sans grands progrès jusqu'ici.

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