chroniques
Club Atletico Tetuán – Moghreb Riadi de Tétouan : Une histoire de ''piratage'', l’histoire du pays en filigrane
Dans ce texte, en petites touches, à travers l’histoire tumultueuse d’une équipe du nord du Maroc, Abdelaziz Tribak livre une esquisse d’une époque
Tétouan est la seule ville du Maroc qui a eu le privilège (footballistique) d’être représentée par deux équipes de football différentes dans deux championnats différents. Le Club Atletico Tetuán (né Athletic le 12 mars 1933, mais changé en Atlético en raison d’une phobie franquiste des anglicismes), club professionnel espagnol qui a pu même jouer une année en première division de la Liga (1951-1952). Et le Moghreb Riadi de Tétouan (Riadi étant traduit par Atlético) club marocain né officiellement le 2 décembre 1928.
Différentes équipes ? Que non hurlent des fans de l’équipe, le MAT actuel c’est le prolongement marocain du Club Atletico des Espagnols, donc le MAT a joué en première division espagnole et en plus dans un « superbe » stade de football construit, prétendent-ils, en 1913 par « l’ingénieur andalous Marquez de Varela ». On te sort cela sans sourciller et si tu soutiens le regard et apporte la contradiction, on t’insulte et on t’accuse de « falsifier l’histoire glorieuse de l’équipe ».
Ce faux disque est ressorti à l’occasion de ce Mundialito 2022 qui a vu Tétouan accueillir les entrainements de Auckland City et Al Ahly…
Mais rétablir l’histoire du MAT est une partie de l’Histoire de la ville qu’on ne peut falsifier à la lumière du jour.
Du « piratage » historique à gogo !
Au retour de l’équipe du Mat en 1ère division (A partir de la saison 2005-06) et avec l’apparition de nouvelles générations de supporters adoptant d’autres formes d’animation, on a commencé à créer des « mythes » plus faux que nature, jusqu’au point de « pirater » l’histoire du Club Atletico Tetuàn, club professionnel espagnol, pour la greffer sur le bon vieux Moghreb de Tétouan national…
Puis un jour on s’est réveillé avec une « révélation » assurant que le stade Saniat R’mel est rebaptisé à son « ancien » nom du protectorat, stade « Marquez de Varela », nom qu’il n’a jamais eu (Il fut nommé stade Varela, sec, pendant une courte période). Des vidéos bricolées sont apparues tissant une toile incroyable de mensonges historiques, ignorant totalement l’ancien Moghreb des Marocains, ou bien faisant un « mélange » entre les deux équipes, qui n’a jamais existé.
Et surtout inventant cette fausse date du « 12 mars 1922 » ! Quelqu’un a pris le 12 mars qui est la date de naissance (Jour et mois) du Club Atletico Tetuán, espagnol, mais en 1933, et l’a apposée à la date inexistante de 1922 ! L’emblème (escudo) du club espagnol a été, aussi, falsifié (dans certaines pages web) et revisité en y apposant la date de 1922 et en y ôtant l’étoile de David qui l’ornait (au départ) pour la remplacer par un pentagramme (très forte la contrefaçon !). Du grand bricolage ne reposant sur aucune réalité. Tous les emblèmes du club espagnol sont répertoriés chez Julio Parrès (J’y reviens en bas) et montrent que le premier est flanqué d’une étoile de David, elle fut changée un moment par le pentagramme, puis reprise pour être enfin délaissée pour le pentagramme dans les années 50. Mais, pour les « faussaires », l’étoile de David n’a jamais figuré sur l’emblème du club espagnol !
Emblème falsifié
Julio Parrès fils (Dans son livre « Tetuán y su Atletico » de Julio Parrès Aragonès ; édité en Espagne,1997), ainsi que toutes les narrations sérieuses de l’histoire du football espagnol, ne citent aucune équipe née en 1922, ni espagnole ni marocaine. Mais, les « faussaires » de l’Histoire croyant que le football est un domaine de « siba » n’en démordent pas. Leurs arguments sont : « De gré ou de force, l’Atletico est né le 12 mars 1922 », le Moghreb c’est l’Atletico, et personne ne pouvait arrêter la célébration du « centenaire » du Moghreb. Bien mieux, on réclame les « titres » de l’Atletico espagnol comme étant des titres de champion du Maroc. Pas la peine de leur expliquer que ces petits « titres » (niveau régional espagnol) ont été gagnés au sein d’une compétition étrangère et qu’ils sont déjà comptabilisés chez la Liga, aussi « petits » soient-ils. Cela ne sert à rien de leur expliquer que la dénomination fédération « Hispanomarroqui » du football (née en 1931), avec siège à Sebta, n’a de « marocain » que l’emplacement géographique, et qu’elle est devenue « Federación Regional del Norte de África », en 1938, nom qu’elle gardera jusqu’en 1985, avec siège à Sebta... Et inutile de leur dire que ce « championnat régional », aussi minime soit-il incluait les villes occupées de Sebta et Melilia et qu’à moins d’être tombés sur la tête, à l’époque (farouchement nationaliste espagnole), le protectorat aurait reconnu ainsi la marocanité de ces deux villes…
Et sur quoi reposent leurs arguments ? Pour d’aucuns le Moghreb serait né en 1922 et a changé de nom jusqu’à devenir l’Atletico Tetuán dans les années trente puis après l’indépendance il a repris son nom d’origine. Une ligne droite presque parfaite mais sans que rien ne l’étaye. Ni le nom des dirigeants des deux équipes qui ne se sont jamais mélangés, ni leurs couleurs, ni leurs destinées. Pour d’autres, il n’y a jamais eu de Moghreb, les Marocains en « qandrissa » n’ont jamais existé. L’Atletico « est né le 12 mars 1922 » et à l’indépendance « la partie espagnole a rejoint Sebta pour former l’Atlético Sebta », et « la partie marocaine a repris le nom de Moghreb Atletico, les couleurs du club espagnol, ses joueurs et ses dirigeants ».
Il est inutile de leur rappeler que le Moghreb a été reconstitué bien avant le départ de l’Atletico vers Sebta, que son premier bureau n’incluait aucun membre de l’ancien Atletico au début, que ses premiers joueurs étaient tous marocains à la renaissance du club, que ses couleurs étaient le rouge et le vert et que son emblème du départ n’avait rien à voir avec celui de l’ancien Atletico… Dire cela s’est pour eux une « hérésie » (« Hartaqa », un peu et ce sera le bûcher !), c’est « bafouer « l’Histoire du club, ne pas reconnaitre ses titres et se mettre sur la même ligne que ses « ennemis » et les « ennemis » de la ville (On croyait qu’il ne s’agissait que de sport, mais apparemment cela devient une « guerre…)
Et c’est quoi finalement leur « argument massue » ? ‘’La FRMF et la FIFA « reconnaissent » la date de naissance du club en 1922’’. La FRMF aurait donc engagé d’éminents historiens (à l’insu de notre plein gré) qui plus est spécialisés en foot ? Alors que tout le monde sait que la FRMF, tout comme la FIFA, n’a fait que reprendre la fiche délivrée par la Moghreb à l’occasion du Mundialito des clubs en 2014. Par ignorance de l’Histoire, ou par calcul, l’ancien comité dirigeant du MAT avait adopté cette histoire bidon et avait brodé autour… Maintenant, les tenants du « centenaire » te disent, puisque la FRMF et la FIFA reconnaissent la date rien ne changera le « centenaire » !
En somme, le serpent qui se mord la queue…
Le Moghreb de Tétouan, l’un des nôtres
Vers la fin des années 20 du siècle dernier, des jeunes marocains de Tétouan, encore en « taqiya » (bonnet marocain) et « qandrissa » (Pantalon bouffant) avaient vite appris à jouer au football. Tétouan sortait de sa torpeur née du fait colonialiste, stimulés par l’avènement du Protectorat et de la tutelle étrangère, les nationalistes marocains commençaient à pointer leur nez (Ecole privée moderne « Al Ahlia » en 1925 ; Imprimerie « Al Mahdia » en 1928, et bientôt suivrait un mouvement associatif, syndical et politique…). Des jeunes marocains arrivèrent à créer une équipe de football et une sorte d’association ex nihilo, montrant ainsi qu’ils pouvaient s’adapter à la nouvelle vie « moderne » qui s’implantait et d’y faire face avec des moyens strictement marocains.
« L’Association al Ittihad al Maghribi » a ainsi commencé ses balbutiements, dont on trouve des traces dans la revue « Al Ittihad », publiée par les autorités du protectorat, au numéro 6 en date du mois d’août 1927.
La revue « Al Ittihad », publiée par les autorités du protectorat, au numéro 6 en date du mois d’août 1927.
L’article soulignant le poids grandissant de l’association est enjolivé d’une photo de l’équipe. Cependant, la date « officielle » de naissance de l’association, et donc de l’équipe de football qui deviendra le Moghreb de Tétouan, est le 2 décembre 1928 quand Ahmed Zougari a déposé une demande d’autorisation auprès des autorités, demande accompagnée des statuts de l’association dûment rédigés, auparavant, par Haj Abdeslam Bennouna. Oui, A. Bennouna, nationaliste de la première heure et parrain de nombreuses initiatives nationalistes de l’époque (Enseignement ; économie ; imprimerie…). C’est l’historien Mohamed Ben Azzouz Hakim qui nous le dit (Voir le livre « Abou al haraka al watania Haj Abdeslam Bennouna- Hayatouhou wa nidalouhou ; Rabat 1987 ; p. 279-280).
« L’Association Al Ittihad al Maghribi » se présentait comme une association « sportive et culturelle ». En 1929, elle inaugure son siège à la place du Feddane. Toutefois, l’autorisation des autorités n’est arrivée que le 1er octobre 1931. Mais, l’association pratiquait ses activités entretemps sans encombre. Et l’équipe de football est passée progressivement de l’appellation « Ittihad Maghribi Tetouani » à « Moghreb de Tétouan » tout court.
Ce Moghreb-là a remporté son unique « trophée » de l’époque, la Coupe de Tétouan, en 1931 contre quelques petites équipes espagnoles. Cet exploit (et c’en était un par rapport à la période et la nouveauté du football pour les Tétouanis) est fixé pour la postériorité par une fameuse photo qui circule toujours.
(L’emblème de l’équipe - « escudo » - en 1931).
Et, cerise sur le gâteau, cette équipe a reçu, en match amical, le fameux club madrilène de l’Atletico de Madrid, en juin 1931, club espagnol professionnel, évoluant à l’époque en deuxième division de la Liga. Un reportage de la revue « Al Ittihad » en a donné un large compte-rendu avec quelques photos, notamment celle d’une réception offerte en l’honneur du club espagnol à la maison d’un notable de Tétouan.
La dénomination « Moghreb » est consignée noir sur blanc au numéro 49 de la revue « Al Ittihad » en date du mois de juin 1931. (Le capitaine Abdelkrim Daoud, frère de l’historien Mohamed Daoud à côté d’un dirigeant de l’équipe en djellaba, y figure aussi le capitaine de l’Atlético de Madrid) Julio Parrès Aragonès, espagnol né à Tétouan, et fils de Julio Parrès Lopez, né lui aussi à Tétouan et ayant exercé en tant que président de l’équipe espagnole Club Atlético Tetuán durant plus de 10 ans (De 1946 à 1956), presque la moitié de la vie du club. Il nous en donne d’autres traces de ce « Moghreb » quand il a rencontré l’équipe espagnole Club Atletico Tetuán lors d’un tournoi pour la coupe de Tétouan durant la saison 1934-35. Le club espagnol l’a remporté en aller-retour sur le même score 3-1 (voir le livre « Tetuán y su Atlético » de Julio Parrès Aragonès ; édité en Espagne ;1997 ; p.25-27). 7
Puis le Moghreb a continué son bonhomme de chemin, avec ses propres moyens (des dirigeants marocains et l’écrasante majorité de joueurs marocains), cahin-caha, jusqu’aux débuts des années 50 où il est presque sorti des « radars », alors qu’un rival marocain local montait en puissance à Tétouan, la Rabita Riyadia qui jouait en division régionale espagnole.
Le Moghreb s’est vite retrouvé, après sa naissance, marginalisé face à une opposition espagnole qui n'a cessé de monter en puissance jusqu’à devenir totalement professionnelle. En l’occurrence, l’équipe espagnole Club Atletico Tetuán, née le 12 mars 1933 (Sous la première dénomination Athletic Club de Tetuán), comme c’est écrit noir sur blanc dans le livre de Julio Parrès fils « Tetuán y su Atletico », livre qui constitue un document fondamental pour « revivre » l’histoire singulière de ce club espagnol.
Le Club Atletico Tetuán est né le 12 mars 1933, donc, et jamais le 12 mars 1922 comme le soutiennent ceux qui ont fêté le « centenaire » de l’actuel Moghreb.
Le Club Atlético Tetuán, un club espagnol professionnel
Emblèmes du club espagnol en différentes périodes ; aucun rapport avec celui du Moghreb de l’époque
Le Club Atletico Tetuán s’est forgé une bonne cuirasse professionnelle, au fil du temps, qui l’a mené, après la guerre civile et surtout depuis l’arrivée à la présidence de Julio Parrès López, père, (en 1946) vers le sommet de la gloire en atteignant la première division de la Liga en 1951-52.
Les autorités du protectorat n’ont pas ménagé leur peine pour aider ce club dans sa lancée, notamment en dotant la ville, à partir de 1948, d’un nouveau stade quasi « olympique » (piste d’athlétisme, coin basket, en plus des terrains de tennis, de pelote basque, de hippisme et d’une piscine à proximité…) unique en son genre au Maroc de l’époque, et ce sur les décombres du petit terrain de football vétuste, impropre au football d’élite, qui existait auparavant sur ce bout du quartier Saniat R’mel.
Le nouveau stade reçut, pour quelques années, le nom du résident général espagnol de l’époque (Alto Comisario) Varela. Contrairement à un autre mensonge en « vogue », Varela qui était un militaire de carrière (Infanterie) n’a jamais été « ingénieur » et n’a jamais construit ce stade en 1913 (Comme certains fans le soutiennent aussi sans sourciller). En 1913 Varela était encore aux études militaires en Espagne et n’a mis les pieds à Melilla qu’en 1915. A Tétouan, il y est arrivé en 1946 en tant qu’ « Alto Comisario » (Résident Général), l’un des plus féroces. Son nom était José Enrique Varela et son titre de « Marquis (« Marquès ») il ne l’a eu qu’après sa mort, à titre posthume, en mars 1951 à Tanger. Donc, l’histoire du plus « ancien stade du Maroc et d’Afrique » n’est qu’un autre mensonge qui ne résiste pas à la recherche. Il n’existait aucun ingénieur de ce nom (ni en 1913, ni après) et l’architecte l’ayant conçu tout comme l’ingénieur qui l’a épaulé étaient archi connus aux années 40 (José Miguel de la Quadra Salcedo et Julio de Castro sous la supervision du délégué des travaux publics Vicente Martorell).
Le Club Atletico Tetuán s’est transformé, progressivement, en équipe de toute la ville (Attirant des spectateurs marocains musulmans et juifs, aux côtés des Espagnols de la ville et même d’ailleurs). Ben Barek, Kubala, Ramallets, Zarra…etc, et d’autres vedettes de l’époque y ont défilé avec leurs prestigieux clubs (le Real, le Barça, l’Atletico de Madrid et de Bilbao…). Le lutin-prodige marocain Lahcen Chicha y a joué après avoir été transféré du fameux « Maghreb al Aksa » (ou Moghreb de Tanger), club marocain né en 1919 et ayant été le seul qui s’est organisé sur des bases professionnelles et qui a joué en troisième division de la Liga aux débuts des années 50.
Toutefois, le Club Atletico Tetuan, club professionnel espagnol, n’a accueilli en son sein, durant ses 23 années d’existence dans la ville, que 10 joueurs marocains en tout et pour tout. De même, les Marocains ayant pu faire partie du comité dirigeant de l’équipe n’ont pas dépassé le nombre de 5 le long de la vie du club.
Lahcen Chicha un diable de joueur
Avec l’indépendance et la réunification du pays (à part le Sahara, Tarfaya, Ifni et les présides), une nouvelle fédération est arrivée au Maroc, la fédération royale marocaine de football. Elle a commencé par établir une nouvelle compétition d’amateurs pour des clubs marocains amateurs. Des barrages furent prévus pour former les trois catégories du football national. Le Nord du Maroc reçut une gifle énorme de la part de cette fédération, les barrages pour le Nord ne devaient donner qu’une seule place en première division et une autre en deuxième… Au reste la troisième division ou le grand large ! Et pourtant le Nord regorgeait d’équipes et de joueurs et possédait trois stades gazonnés : Tétouan, Tanger et Ouazzane dont deux sans pareil dans le reste du pays (à part le nouveau Stade d’Honneur). Quelques équipes tangéroises boycottèrent et le Moghreb de Tétouan décrocha son billet. La fédération avait priorisé Casablanca : 7 équipes en première division dont 2 dégringolèrent en deuxième à la fin de l’exercice et une troisième se retira la deuxième année (3 pour Rabat en l’absence de l’équipe des Far pas encore née) … Il n’y eut pas de politique volontariste envers le Nord pour sauvegarder l’immense tradition de football léguée par le protectorat. Les politiciens de l’époque n’avaient d’yeux que pour le « Maroc utile » et le positionnement dans la lutte pour le pouvoir…
A Tétouan, la Rabita Riyadia était puissante et avait les meilleures chances, mais d’autres Tétouanis (impulsés par le leader Abdelkhalek Torrès, dit-on) ont tenu à re-créer le Moghreb Riadi de Tétouan (en début juin 1956) en hommage à l’ancien Moghreb de l’effervescence nationaliste de la fin des années 20. La presse espagnole de Tétouan (Africa Deportiva en date du 01-10-1956) et auparavant même madrilène (Abc, en date du 09-06-1956), ont noté la « résurrection » et « la réapparition » du Moghreb Riadi (ainsi appelé par cette presse), « d’un vieux nom » (« Un viejo nombre »). ABC a même cité le nom de son premier comité entièrement marocain. Le Moghreb a repris vie en recrutant à tour de bras parmi les joueurs marocains de la région. Il a pu battre, au bout de 3 matches-barrage serrés la Rabita Riyadia à l’avant dernier tour, puis en finale il a surclassé l’Atlas de Tanger facilement. (
Dénomination et emblème du club, années 60).
Le Moghreb a, donc, été relancé alors que le Club Atletico Tetuán, espagnol, existait toujours. L’équipe était composée uniquement de joueurs marocains, au début, et son premier comité dirigeant était entièrement marocain. D’ailleurs, en prévision du départ prévisible de l’équipe espagnole, le Moghreb a rencontré l’Atletico en amical/hommage à ce qu’il avait apporté au sport de la ville (le dimanche 1er juillet 1956 ; dans le journal « Al Oumma » n°875).
Le Club Atletico Tetuán , espagnol, était en « suspens », ses dirigeants négociaient une éventuelle fusion avec une équipe de Sebta, alors que Parrès père (Tétouani de naissance) pensait arriver à « une solution » avec la FRMF. Celle-ci lui refusa (vers le 7 juillet 1956) toute possibilité de rester au Maroc en tant que club étranger ou professionnel. Donc, la mort dans l’âme, Julio Parrès père fusionna son Atlético avec cette équipe de Sebta, ce qui a donné l’Atletico Ceuta ayant gardé les mêmes couleurs que le Club Atletico Tetuán (le rouge et le blanc) … Cette fusion est consignée dans différents documents de l’époque dont l’Acta 102 (Voir livre de Parrès fils, p. 473) … Ce document indique, entre autres, que l’Atletico Ceuta prendra les meilleurs éléments de l’ancien Atlético et laissera libres de tout engagement le reste des joueurs.
Le nouvel Atletico, de Ceuta cette fois-ci (Et dont le président n’était plus Julio Parrès père), est reparti sur d’autres bases dans une autre ville.
Les joueurs espagnols non retenus retournèrent en Espagne ou bien restèrent dans leur ville de naissance, Tétouan, pour d’autres années encore. Certains d’entre eux ont rejoint la Rabita Riyadia, au début, et d’autres directement le Moghreb Riadi de Tetouan.
Après les barrages qualificatifs (Au mois de septembre 1956) pour les différentes catégories nationales et suite à l’échec de la Rabita et à la montée du Moghreb Riadi en première division, de nombreux joueurs de la Rabita, dont des Espagnols, renforcèrent les rangs du Moghreb.
Le nouveau Moghreb avait, donc, un nouvel emblème différent de celui de ses débuts, et n’ayant rien à voir avec celui du Club Atletico de Tetuán. Ses premières couleurs étaient le 11 rouge-vermeille pour les maillots et le vert pour le short (se faisant appeler les « bermejos » ou les « colorados » par la presse locale espagnole de l’époque). Rien à voir, donc, avec le « rougeet-blanc » de l’ancien Atletico espagnol. Une saison ou deux après, le Moghreb (Parrainé provisoirement par le corps de police) est passé à une tenue blanche avec scapule rouge-etverte. Puis, aux débuts des années 60, le Moghreb adopta le rouge-et-blanc actuel. On en ignore la véritable raison. Était-ce pour récupérer un public qui avait boudé le championnat marocain, fruste et dur à ses débuts, pour suivre son ancien Atletico à Sebta et ailleurs ? Le Moghreb, d’ailleurs, n’a récupéré son public qu’en 1964-65 avec l’avènement d’une génération locale exceptionnelle de joueurs : Moussa, Marrakchi, Loukili, Houmrani, Miti, Bakkali… Mais avec peu de ressources financières et zéro soutien à Rabat (arguments ô combien nécessaires pour survivre à l’époque).
(L’une des premières formations du Moghreb Riadi de Tétouan au cours de la saison 1956-57)
A cause de ce manque de ressources et d’un « parrain » à Rabat (Jusqu’à l’ère Abroun), le Moghreb a longtemps souffert en première division où il était un « usuel » candidat pour descendre (au bout d’injustices incroyables parfois) quelle que soit la qualité des joueurs (et il en eut de très bonne qualité). Tout cela est développé dans mon livre sur l’Histoire du Moghreb de Tétouan en première division (Paru en mars 2021.
Donc voilà : Une même ville et deux équipes différentes qui l’ont représentée à des époques différentes dans deux championnats différents. L’une espagnole et professionnelle, est partie avec le protectorat, et l’autre, plus ancienne et marocaine qui renaquit de ses cendres dans une autre époque faite pour elle. Mais, le mensonge court toujours…