Tollé en Afrique du Sud suite à un appel à Washington pour surveiller les élections

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La députée et porte-parole de l’Alliance démocratique, Emma Powell

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Johannesburg - Une polémique a éclaté en Afrique du Sud suite à l’appel lancé par le principal parti de l’opposition, l’Alliance démocratique (DA), au Secrétaire d’État américain et à d’autres ministres des Affaires étrangères en Europe, demandant de l’aide afin de garantir la transparence et la crédibilité des prochaines élections générales prévues le 29 mai.

Dans une lettre adressée à Antony Blinken par l’intermédiaire de l’ambassade des Etats-Unis à Pretoria, datée du 7 mars 2024, la députée et porte-parole de l’Alliance démocratique, Emma Powell indique que son parti est mal à l’aise avec l’élite du Congrès National Africain (ANC au pouvoir), car «elle risque de devenir encore plus désespérée et de tenter de truquer le prochain scrutin décisif».

Le DA souhaite que les États-Unis aident à surveiller les prochaines élections en Afrique du Sud, afin, dit-il, «d’empêcher l’ANC et d’autres forces extérieures d’obtenir ce qu’ils veulent». «Alors que l’élite dirigeante cherche désespérément à conserver le soutien électoral avant les prochaines élections, nous pensons qu’elle sera prête à faire passer ses intérêts politiques étroits avant les intérêts plus larges de notre pays», écrit Mme Powell dans cette lettre.

Elle a de même déclaré que son parti «assiste à une volonté croissante de l’ANC de forger des alliances avec des acteurs internationaux malveillants, dont les régimes sont caractérisés par la tyrannie, la terreur et l’oppression».

Notant que l’Alliance démocratique souhaitait que les États-Unis fournissent des observateurs supplémentaires afin de «sauvegarder l’intégrité des élections», la responsable a émis l’espoir que «toutes les ressources technologiques disponibles seront conçues pour atténuer les sinistres tentatives de manipulation des résultats des élections, en particulier au sein des communautés vulnérables».

L’initiative de DA a provoqué un tollé au sein de la société sud-africaine et des critiques acerbes du parti au pouvoir qui estime que «l’appel à des observateurs occidentaux pour les élections sud-africaines équivaut à offrir la souveraineté de l’Afrique du Sud sur un plateau d’argent».

L’ANC, par l’intermédiaire de son porte-parole national, Mahlengi Bhengu-Motsiri, a réagi avec colère à la lettre de l’Alliance démocratique, affirmant que son parti ne connaît pas la raison de ces crises de colère de la part de l’opposition. "Cet appel est une tentative claire de provoquer un changement de régime, déguisée en langage opportuniste", a-t-il déclaré.

Sur ce ton dénonciateur, la ministre des Affaires étrangères, Naledi Pandor, a qualifié de "stupéfiante" la demande de l’Alliance démocratique, alors que le Président Cyril Ramaphosa a accusé le principal parti d’opposition de chercher à "hypothéquer" la nation auprès de puissances étrangères.

Idem pour la Commission électorale indépendante (CEI) qui a critiqué l’appel à un soutien accru de l’Occident pour la surveillance des élections de mai prochain, affirmant qu’elle interférait directement avec son travail. L’ancien Commissaire de la CEI, Terry Tselane, a même appelé à prendre des mesures fermes contre le parti d’opposition pour avoir demandé l’implication des gouvernements occidentaux dans les élections générales du pays.

Alors que certains estiment que cette décision est «hautement provocatrice», d’autres, au contraire, soutiennent l’initiative de l’Alliance démocratique, arguant que la Commission électorale d’Afrique du Sud dispose d’un budget limité pour faire face efficacement à d’éventuelles failles de sécurité telles que le piratage.

Cette nouvelle controverse éclate alors qu’une nouvelle enquête révèle que le soutien au Congrès Nation Africain est tombé à 39 %, ce qui rend très probable la formation d’un gouvernement de coalition, après les élections.

Alors que le DA et le parti MK de l’ex-président Jacob Zuma réalisent de solides progrès à deux mois de ce scrutin décisif, l’enquête nationale réalisée auprès des électeurs pour le compte de la Fondation Brenthurst montre que la politique étrangère de l’ANC et la faiblesse de son leadership rebutent les électeurs. Elle révèle aussi que plus de la moitié des électeurs accusent le gouvernement ANC des trois dernières décennies d’être responsable des maux dont souffre l’Afrique du Sud.

Au total, 27,7 millions d’électeurs inscrits sur les listes électorales sont appelés à se rendre aux urnes le 29 mai pour renouveler leur Parlement, qui désignera à son tour le prochain chef de l’Etat.

 

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