Vivre, c’est aussi renoncer… Par Samir Belahsen

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Après avoir relu ses journaux intimes de jeunesse, Polzoniov se rend compte à quel point sa vie était autrefois pleine de possibilités et d'espoirs ….

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Le visiteur … Par Samir Belahsen

“Le renoncement : héroïsme de la médiocrité.”

Natalie Clifford Barney 

 Pensées d'une Amazone

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"Ma vie" est une célèbre nouvelle d'Anton Tchekhov qui explore des thèmes tels que le sens de la vie, les relations humaines, les aspirations et les renoncements individuels.

Dans cette nouvelle, Anton Tchekhov raconte l'histoire d'un jeune commis de la fonction publique, Polzoniov, qui rêve de vivre une vie plus excitante et palpitante. 

Après avoir relu ses journaux intimes de jeunesse, Polzoniov se rend compte à quel point sa vie était autrefois pleine de possibilités et d'espoirs. Il se confronte alors à la monotonie et à la fadeur de sa vie actuelle. À travers ce court récit, Tchekhov explore des thèmes forts la nostalgie, le regret et de la recherche de sens dans nos existences au quotidien.

L’histoire 

Missaïl Polzoniov vient de se faire licencier encore une fois de son poste. C’est son septième. Il veut, ou pense vouloir, faire un travail physique. Son père, quant à lui, préfère qu’il perpétue la glorieuse lignée intellectuelle de la famille.

« Vous êtes bizarre ! Vous n’êtes pas normal ! Je ne veux pas faire le prophète mais vous finirez mal ! », disait dans la nouvelle un ingénieur à Polzoniov.

Anna Blagovo, une amie de sa sœur, le recommande pour une place dans les chemins de fer. Il devient télégraphiste à la gare de Doubétchnia, loin de la ville, les ingénieurs du chemin de fer ayant demandé un pot de vin de cinquante mille rouble pour faire la gare en ville…

Quand le directeur de la ligne lui annonce son licenciement il devient peintre en bâtiment. Il revit. Il est libre, il quitte le domicile du père. 

Tout allait bien quand vint le temps des désillusions, la paie qui tarde, les vols entre ouvriers, l’injustice qui accompagne le pouvoir. 

Seules deux personnes le défendent contre les bien-pensants de la ville, le Docteur Blagovo et Maria Doljikov. À leur contact, il sent qu’il a besoin de savoir, de comprendre et d’apprendre plus.

Sa conduite intrigue les autorités. Il est convoqué chez le gouverneur... Il doit changer de conduite ou partir.

Il part s’installer avec Maria à côté de la gare et se marient. Ils deviennent partisans de la « marche vers le peuple », une utopie politique qui va très tôt se fracasser sur l’ignorance des paysans, les vols, l’alcoolisme. Maria le quitte …

Cléopâtre, sa sœur est enceinte. En attendant l’enfant, ils habitent ensemble. Cléopâtre est malade, le père de l’enfant, le fameux docteur Blagovo, l’abandonne lâchement.

Des années plus tard, Polzoniov est devenu entrepreneur. Il a recueilli sa nièce, la fille de sa sœur Cléopatre. Il a appris à accepter la déception, la désillusion.… Dans un langage plus actuel, on dirait, il a appris à gérer…

Le message fondamental de cette nouvelle pourrait être interprété de différentes manières selon les lecteurs. Il pourrait aussi évoluer chez le même lecteur avec l’âge et les situations.

On pourrait dire qu'il souligne l'importance de la compréhension mutuelle, de l'empathie et de la réflexion sur nos propres vies et choix. Tchekhov nous invite à réfléchir sur la nature de nos existences, sur la façon dont nous interagissons avec les autres, sur nos désenchantements et d’une certaine manière sur nos renoncements.

Et vivre, c’est aussi renoncer ; un peu, beaucoup, mais point trop n’en faut.

Car à trop renoncer, ne fait-on pas que survivre ?

En filigrane, l’auteur renvoie à la relecture des journaux intimes de jeunesse, point de départ de la nouvelle. C’est un exercice fortement déconseillé, il y a souvent un réel gouffre entre les rêves et les espoirs confiés à un journal intime et les duretés de la vie réelle…  Faudrait-il pour autant y renoncer ?

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