Le roman '' Makila'' d’Elvis Ntambua, un récit édifiant sur le calvaire des enfants-soldats

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"Makila" d’Elvis Ntambua est un ouvrage singulier par sa thématique et saisissant par ses passages, interrogeant tout un chacun sur la relation paradoxale entre guerre et enfance

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Par Manal Koubia (MAP)

Oujda - Premier ouvrage de l’écrivain congolais Elvis Ntambua, paru aux éditions La Croisée des Chemins (2024), "Makila" est un roman à la croisée de la fiction et du réel qui interroge, sensibilise, décrit et raconte le vécu de ces enfants-soldats a qui la guerre a gangréné toute perspective d’avenir paisible.

Prix littéraire Émilie-Flore Faignond, "Makila" est un ouvrage singulier par sa thématique et saisissant par ses passages, interrogeant tout un chacun sur la relation paradoxale entre guerre et enfance à travers le cheminement d’un enfant-soldat de 11 ans nommé Tshituala.

Dans une interview accordée à la MAP, en marge de sa participation au Salon maghrébin du livre d’Oujda, Elvis Ntambua a expliqué que le titre de son œuvre veut dire "sang" en lingala (langue bantoue parlée en République Démocratique du Congo et en République du Congo), utilisé dans cette œuvre pour résumer tout ce qui se rapporte aux enfants-soldats et fait référence au sang qui a coulé, à la mort et au sacrifice.

A travers la thématique de cette œuvre, l’auteur congolais tente de jeter la lumière sur "une réalité" dont on ne parle pas et qui devient pratiquement "une normalité", insistant sur la nécessité de "donner la voix" à ces enfants-soldats pour attirer l’attention sur ce fléau.

"Quand un enfant devient soldat, il n’a plus de place dans la société, c’est pourquoi il faut décrire ce qu’est un enfant-soldat, redéfinir les enjeux et expliquer comment il est arrivé là", a-t-il détaillé.

Ainsi, "Makila" est un livre qui cristallise, en finesse, les enjeux d’une Afrique complexe, où Histoire, politique et culture s’entremêlent pour informer et documenter l’horreur de la guerre, au fil d’un récit envoûtant où s’entrechoquent deux mondes différents (enfance vs. guerre).

Parsemé de précieux messages, bouleversant par la réalité qu’il décrit et captivant par son récit, "Makila" est un de ces ouvrages qu’on lit avec le cœur et l’esprit et dont on ne peut se détacher facilement.

Dans cette fiction réelle, le lecteur plonge dans un imaginaire difficile, où la symbolique est forte, que ce soit au niveau des noms de certains personnages réduits à des lettres d’alphabet, ou à la manière avec laquelle certaines scènes déchirantes sont décrites.

"J’ai cligné des yeux, le temps est passé. Deux ans se sont écoulés. J’ai treize ans. Je n’ai pas profité de mon enfance. Elle fut courte. Effacée", explique le personnage principal, (p.91), pris dans le tourbillon de sa propre conscience.

Elvis Ntambua, à travers sa prise de position assumée quant aux ravages psychologiques et émotionnels causés par la guerre chez les enfants-soldats, agit en parfait funambule, réussissant à trouver un juste milieu entre le factuel, dans le but d’informer et l’émotionnel, destiné à rapprocher le lectorat des ressentis de Tshituala ainsi que des choix cornéliens auxquels sont confrontés ce type d’enfants.

"La guerre change les gens, elle les empoisonne, les détruit même quand la paix les guérit", lit-on dans cet ouvrage (p.224) qui met en lumière ces zones d’ombres que certains préfèrent oublier lorsque l’on parle d’Afrique.

Elvis Ntambua Mampuele, né au Congo (Kinshasa) est auteur. Diplômé en information-communication à l’université Lumière Lyon 2, il est également coorganisateur de l’événement "Au son de la Rumba", accompagnant la candidature conjointe des deux Congo pour l’inscription de la rumba au patrimoine immatériel de l’Unesco.

Il est aussi le créateur de la première boîte à livres à Kinshasa, dans la commune de Lingwala, pour rendre gratuit et faciliter l’accès aux livres à ceux qui en manquent.

 

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