Cinéma, mon amour de Driss Chouika : MARTIN SCORSESE, UNE QUÊTE DE PERFECTION DANS LA VIOLENCE

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Martin Scorsese vient de recevoir de la Berlinale de 2024 un Ours d’Or d’Honneur pour l’ensemble de sa carrière qui n’est pas finie pour autant

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Cinéma, mon amour !'' de Driss Chouika - LE CINÉMA UNDERGROUND : QUAND  L'AMÉRIQUE FAISAIT SON CINÉMA EXPÉRIMENTAL 

« Lorsque vous êtes obsédé par une forme d’art, lorsque vous la vivez, lorsque vous devez vous débrouiller seul, car vous devez être seul, il y a une part de solitude. Mais, il est primordial de se rappeler que, même si c’est un métier solitaire, on fait partie d’une communauté, et que cette communauté est animée par un amour obsessionnel pour cet art que l’on nomme Cinéma ». Martin Scorsese.

Après le Lion d’Or pour sa carrière, décerné par La Mostra de Venise en 1995, et après avoir récolté une quantité impressionnante de récompenses les plus prestigieuses dans les plus grands festivals, Martin Scorsese vient de recevoir de la Berlinale de 2024 un Ours d’Or d’Honneur pour l’ensemble de sa carrière qui n’est pas finie pour autant, ayant déclaré à l’occasion, ému, qu’il a la ferme intention de continuer à faire des films. En cela il reste fidèle à lui-même, ayant déjà affirmé qu’« il y a deux choses dont l'absence m'interdirait de vivre : le cinéma et la grâce ».

Né le 17 novembre 1942 au Queens à New York, Martin Scorsese a été fasciné par le cinéma dès son plus jeune âge. Élevé dans une famille d'origine italienne, il a été séduit par les films néo-réalistes italiens, une influence qui se ressentirait profondément dans son propre travail. Scorsese a étudié la cinématographie à la Tisch School of the Arts de l'Université de New York, où il a développé sa passion pour la réalisation.

Depuis les rues bruyantes de Little Italy à New York jusqu'aux tapis rouges de Hollywood et ailleurs, la carrière de Martin Scorsese a été un voyage cinématographique extraordinaire. Avec une filmographie riche et diversifiée, Scorsese s'est imposé comme l'un des réalisateurs les plus influents de l'histoire du cinéma. Au cours de ses décennies de carrière, il a capturé l'essence de la condition humaine à travers la lentille de la violence qui envahit le monde moderne, créant une esthétique basée sur une violence poussée à l’extrême.

Dès le début de sa carrière, Scorsese a montré une préférence pour les sujets audacieux et controversés. Son premier long métrage, "Who's That Knocking at My Door" (1967), a immédiatement attiré l'attention pour son exploration franche de la sexualité et de la religion. Mais c'est avec "Mean Streets" (1973) que Scorsese a réellement fait son entrée dans le monde du cinéma. Ce film, porté par les performances de Harvey Keitel et Robert De Niro, a établi bon nombre des thèmes et des styles qui deviendraient les signatures de Scorsese : la criminalité, la culpabilité et la spiritualité, dans un univers marqué par une forte et sourde violence.

UNE MULTIPLICITÉ DE GENRES

Ce qui distingue vraiment Scorsese en tant que réalisateur, c'est sa capacité à naviguer avec aisance à travers une variété de genres. Du thriller psychologique ("Shutter Island", 2010) à la comédie noire ("The King of Comedy", 1982), en passant par le drame historique ("Gangs of New York", 2002), Scorsese ne se contente jamais de rester dans une seule catégorie. Chaque film est une aventure, une exploration de nouveaux territoires cinématographiques.

Pourtant, c'est dans le monde du crime organisé que Scorsese semble le plus à l'aise. "Goodfellas" (Les affranchis), souvent cité comme l'un des plus grands films de gangsters jamais réalisés, offre un regard sans concession sur la vie des mafieux. Avec sa narration haletante et son style visuel distinctif, le film est devenu un incontournable du genre.

Dans ce contexte, la relation entre Martin Scorsese et Robert De Niro a joué un rôle important dans le développement d’un style bien particulier. Leur collaboration reste sans doute l'une des plus légendaires dans l'histoire du cinéma. Elle a donné naissance à certains des films les plus acclamés de tous les temps. "Taxi Driver" (1976), un portrait sombre et troublant d'un vétéran de la guerre du Vietnam devenu chauffeur de taxi, a valu à Scorsese sa première nomination aux Oscars. Le duo a continué à captiver le public avec "Raging Bull" (1980), un biopic brut et viscéral du boxeur Jake LaMotta, qui a valu à De Niro son deuxième Oscar.

UNE ESTHÉTIQUE DE LA VIOLENCE

Ce qui unit tous les films de Scorsese, qu'ils traitent de gangsters, de boxeurs, de musiciens ou de religieux, c'est son attention méticuleuse aux détails et sa quête incessante de la perfection. Chaque plan est soigneusement composé, chaque mouvement de caméra est réfléchi. Scorsese est un cinéaste qui sait ce qu'il veut, et qui repousse sans cesse les limites de son art.

Prenons par exemple "The Aviator" (2004), la biographie épique de Howard Hughes. Scorsese a non seulement capturé l'époque avec une précision stupéfiante, mais il a également plongé profondément dans l'esprit troublé du magnat de l'aviation. Le film a valu à Scorsese son premier Oscar du meilleur réalisateur, une récompense depuis longtemps méritée pour un maître du cinéma.

Martin Scorsese est un cinéaste à la vision vaste et profonde. Ses films ont influencé des générations de cinéastes, de Quentin Tarantino à Paul Thomas Anderson, tous reconnaissant l'impact qu'il a eu sur leur propre travail. Il est bien plus qu'un réalisateur de films. Il est un visionnaire, un artiste dont l'œuvre transcende le simple divertissement pour devenir une exploration profonde de ce que signifie être homme dans le monde moderne. Il est resté fidèle à sa vision spécifique, obsédé par la violence humaine à tel point d’inventer une esthétique de la violence permettant d’offrir un aperçu inoubliable de la condition humaine à travers des films d’un impact bien performant et durable. Cette esthétique de la violence est devenue une quête permanente de la perfection dans le cinéma de Scorsese. Ce qui exprime parfaitement sa conception particulière du film : « Un film est l'expression d'une vision unique - plus il est personnel, donc, et plus il s'approche du statut d'oeuvre d'art. Ce qui signifie qu'il restera plus longtemps à l'épreuve du temps ». 

FILMOGRAPHIE ٍSELECTIVE DE MARTIN SCORSESE (LM)

« Who’s That Knocking at my Door » (1967) ; « Bertha Boxcar » (1972) ; « Taxi Driver » (1976) ; « New York, New York » (1977) ; « Raging Bull » (1980) ; « La valse des pantins » (1983) ; « After Hours » (1985) ; « La couleur de l’argent » (1986) ; « La dernière tentation du Chrisr » (1988) ; « Les affranchis » (1990) ; « Les nerfs à vif » (1991) ; « Le temps de l’innocence » (1993) ; « Casino » (1995) ; « Kundun » (1997) ; « A tombeau ouvert » (1999) ; « Gangs of New York » (2002) ; « Aviator » (2004) ; « Les infiltrés » (2006) ; « Shutter Island » (2010) ; « Le loup de Wall Street » (2013) ; « Silence » (2016) ; « The Irishman » (2019) ; « Killers of the Flower Moon » (2023).

 

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