Chronique ''Cinéma, mon amour'' : LA FILLE DE RYAN, UNE ÉPOPÉE ROMANTIQUE AU COEUR D’UNE IRLANDE EN QUÊTE D’INDÉPENDANCE

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L’histoire du film se déroule pendant la Première Guerre mondiale, mais l'intrigue se concentre davantage sur les répercussions sociales et personnelles du conflit plutôt que sur les événements directement liés à la guerre

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Cinéma, mon amour !'' de Driss Chouika - LE CINÉMA UNDERGROUND : QUAND  L'AMÉRIQUE FAISAIT SON CINÉMA EXPÉRIMENTAL

« La Fille de Ryan, c’est le film culte de David Lean… C’est un cinéma de symboles, à la manière du cinéma russe. L’action se déroule dans l’Irlande du 19ème siècle, avec des décors somptueux, des sous-bois qui peuvent rappeler Bambi, de Walt Disney ». Mylène Farmer.

Parti de l’idée d’une adaptation libre de “Madame Bovary“ de Gustave Flaubert, sur fond de l’effervescence indépendantiste de l’Irlande de la deuxième décennie du 19ème siècle, “La fille de Ryan“ (Ryan's Daughter) de David Lean, dont le nom est associé à de bien grands drames historiques avec des personnages d’une grandeur notoire, ayant remporté plusieurs oscars et prix prestigieux à sa sortie en 1970, précédée par des rumeurs des plus folles sur un tournage d’une rare extravagance, ayant duré quatorze mois au lieu des dix semaines prévues initialement, entrainant un dépassement budgétaire collossal, ce film a rencontré finalement un grand succès auprès du public, rapportant à ses producteurs plus que le double du budget investi, pour finir comme l’un des films cultes de son réalisateur et de toute l’histoire du cinéma mondial. Il a même été hissé par la critique, après sa ressortie en 2013, au rang des plus mythiques chefs-d’oeuvres du cinéma.

"La Fille de Ryan" (Ryan's Daughter) marque la collaboration entre le réalisateur britannique David Lean et l'écrivain Robert Bolt. Situé dans le contexte de l'Irlande du début du XXe siècle, le film s'éloigne des épopées épiques habituelles de Lean pour explorer une histoire romantique et humaine complexe. Pour en avoir une idée claire, l’histoire du film peut être résumée ainsi : On est en 1916, dans le petit village de Kirrary de la Péninsule irlandaise de Dingle, la fille du patron du pub, Rosy, épouse Charles Shaughnessy, le maître d'école, son aîné de quinze ans. Mais, dès les premiers jours du mariage, son mari, bien qu'amoureux, ne lui donne pas les satisfactions que Rosy est en droit d'attendre. Déçue, elle entre dans une liaison occulte avec le major Randolph Doryan qui a pris le commandement de la garnison de la région. Mais 1916, c'est également l'année de l’Insurrection de Pâques à Dublin et l’effervescence de la lutte d’indépendance contre l'« occupant » anglais… 

UNE ÉPOPÉE ROMANTIQUE SUR FOND INDÉPENDANTISTE

L’histoire du film se déroule pendant la Première Guerre mondiale, mais l'intrigue se concentre davantage sur les répercussions sociales et personnelles du conflit plutôt que sur les événements directement liés à la guerre. L'histoire se déroule dans un petit village côtier en Irlande, où les tensions politiques et sociales sont exacerbées par l'arrivée d'un officier britannique et les événements qui en découlent. La cinématographie est époustouflante et David Lean, connu pour ses compositions visuelles grandioses, livre une fois de plus un traitement cinématographique éblouissant. Les vastes paysages irlandais sont capturés avec une beauté saisissante, soulignant l'isolement du village et créant un contraste avec les tumultes émotionnels de ses habitants.

Avec un casting d’exception et une direction de comédiens tout aussi exceptionnelle, Lean en tire des performances mémorables. Sarah Miles, qui incarne Rosy Ryan, apporte une grande complexité émotionnelle au personnage, tandis que Robert Mitchum, dans l’une des rares fois où il est dans la peau d’un personnage négatif, celui de l'officier britannique, offre une interprétation nuancée et captivante. Au centre de l'histoire, Rosy évolue d'une jeune femme romantique à une figure tragique, confrontée aux conséquences dévastatrices de ses choix. La manière dont son personnage se déroule reflète les conflits intérieurs et extérieurs qui tourmentent le village. L’approche de Lean explore les tensions entre les résidents du village et les forces extérieures, symbolisées par l'officier britannique. Ces dynamiques reflètent les troubles politiques de l'Irlande de l'époque, ajoutant une couche de réalisme et de pertinence historique à l'intrigue.

UNE EXPLORATION POIGNANTE DE L’AMOUR ET LA TRAHISON

"La Fille de Ryan" de David Lean se distingue comme un chapitre unique dans la filmographie du réalisateur. Avec sa sensibilité romantique, sa représentation visuelle captivante de l'Irlande, et son exploration des dynamiques sociales, le film demeure un témoignage du talent de Lean pour raconter des histoires complexes. Alors que l'œuvre peut parfois être éclipsée par les précédents chefs-d'œuvre du réalisateur, elle occupe une place spéciale en tant qu'exploration poignante de l'amour, de la trahison et des conséquences de la guerre, ancrée dans le contexte historique de l'Irlande tumultueuse du début du XXe siècle.

Il faut aussi signaler que la bande sonore du film, composée par Maurice Jarre, contribue de manière significative à son atmosphère émotionnelle. La musique capture les éléments romantiques de l'intrigue tout en soulignant les moments dramatiques, créant une expérience immersive pour le spectateur.

Malgré des critiques mitigées à sa sortie, "La Fille de Ryan" a gagné en appréciation au fil du temps. Il a été reconnu pour sa réalisation artistique exceptionnelle, son exploration complexe des personnages et son engagement envers des thèmes sociaux et politiques d’une grande portée humaine. Bien que différent des précédentes épopées de Lean, le film offre une expérience cinématographique poignante et mémorable et demeure une pièce maîtresse dans la filmographie de David Lean,

FILMOGRAPHIE DE DAVID LEAN (LM)

« Heureux mortels » (1944) ; « L’esprit s’amuse » (1945) ; « Brève rencontre » (1945) ; « Les grandes espérances“ (1946) ; « Oliver Twist » (1948) ; « Les amants passionnés » (1949) ; « Madeleine » (1950) ; « Le mur du son » (1952) ; « Chaussure à son pied » (1954) ; « Vacances à Venise » (1955) ; « Le pont de la rivière Kwai » (1957) ; « Lawrence d’Arabie » (1962) ; « Le Docteur Jivago » (1965) ; La fille de Ryan » (1970) ; « La Route des Indes » (1984).

 

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