Des fouilles révèlent que la civilisation au Maroc a précédé les Phéniciens et les Marocains ne les ont pas attendus pour se sédentariser

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L’étude publiée sur le site Cambridge University Press indique que les fouilles ont identifié trois phases principales d’occupation :

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L’histoire des rives européennes de la Méditerranée à l’âge du Bronze et au début de l’âge du Fer est bien connue, mais celle des rives africaines demeure largement méconnue. Les fouilles dansle site de Kach Kouch (KK) au nord-ouest du Maroc apporte de nouvelles données sur l’occupation humaine dans cette région entre 2200 et 600 av. J.-C. Elle remet en cause l’idée d’un Maghreb vide de civilisation avant l’arrivée des Phéniciens et met en évidence le rôle actif des populations locales dans les réseaux d’échange méditerranéens et atlantiques.  

Un site révélateur d’une occupation ancienne et continue  

Le rapport des fouilles* publié sur le site Cambridge University Press* indique que les fouilles ont identifié trois phases principales d’occupation :  

  1. KK1 (2200–2000 av. J.-C.) : Une occupation précoce attestée par quelques vestiges (poteries, ossements), correspondant à la transition entre l’âge du Cuivre et l’âge du Bronze en Ibérie.  
  2. KK2 (1300–900 av. J.-C.) : Une implantation stable avec des structures en torchis, une économie agricole complète et des connexions avec l’Europe.  
  3. KK3 (VIIIe–VIIe siècles av. J.-C.) : Phase marquée par l’arrivée de nouvelles influences culturelles (métaux, poteries tournées, nouvelles espèces agricoles), tout en conservant des traditions locales.  

Outils de meulage (A–D) et objets métalliques (E–G) de Kach Kouch. Les résultats de la fluorescence X portable sur les objets métalliques sont présentés dans le tableau. MDL = Limite de détection de la méthode (photographies de M. Radi).

Une économie agricole et un habitat structuré  

Les découvertes montrent que l’agriculture était bien développée à Kach Kouch, avec des cultures céréalières (blé, orge), des légumineuses (fèves, pois) et des fruits domestiqués (raisins, olives). L’élevage était aussi central, notamment des moutons, des chèvres et des bovins. L’architecture révèle un passage de structures circulaires en torchis à des bâtiments rectangulaires sur base de pierre, une hybridation entre traditions locales et influences phéniciennes.  

Un rôle clé dans les échanges méditerranéens et atlantiques  

Situé à proximité du détroit de Gibraltar, Kach Kouch montre des interactions soutenues avec les régions voisines, en particulier l’Ibérie. La présence d’objets métalliques, de céramiques importées et d’influences architecturales illustre l’intégration de ce site dans des réseaux d’échanges complexes bien avant la colonisation phénicienne.  

Une remise en question des idées reçues sur le Maghreb pré-phénicien  

Ces découvertes démontrent que le nord-ouest du Maghreb n’était pas une terra nullius avant l’arrivée des Phéniciens. Les populations locales avaient déjà développé des structures sociales et économiques avancées, intégrant des innovations externes tout en maintenant leurs propres traditions. L’abandon de Kach Kouch vers 600 av. J.-C. pourrait être lié aux bouleversements provoqués par l’émergence de nouvelles colonies côtières et à l’intensification des hiérarchies sociales et économiques. 

Kach Kouch offre ainsi les premières preuves d’une occupation sédentaire à l’âge du Bronze dans le nord-ouest de l’Afrique. Ces résultats appellent à réévaluer l’importance des sociétés localeset à approfondir les recherches sur cette période encore peu documentée au Maghreb.

*Pour l’intégralité de ce rapport, lire : Repenser l'Afrique méditerranéenne préhistorique tardive : architecture, agriculture et matérialité à Kach Kouch, Maroc

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