Les matins de Jénine : De Napoléon à Ben-Gvir - Dr Samir Belahsen

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La dépouille de Khairi Shaheen, l'un des Palestiniens tués par les forces israéliennes lors d'une opération militaire, lors de son enterrement à Naplouse dans la Cisjordanie occupée le 7 juillet 2023. (Photo par Zain JAAFAR / AFP)"

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J’emprunte le titre de cette chronique à Susan Abulhawa qui a commis sous ce titre l’une des plus belles fictions historiques traitant de la Palestine à travers la vie des membres de la famille Abulheja sur quatre générations, à partir de 1941 à Ein Hod, un village palestinien où les habitants vivent de la culture des olives. 

En 1948, année de la création de l'entité sioniste sur les terres historiques de la Palestine, le village est occupé par les colons. Ses habitants se réfugient dans le camp de Jénine où naitra Amal, la dernière de la famille Abulheja, pivot et narratrice du roman.

Les Matins de Jénine, c’est l’histoire de la famille de Hassan et de Dalia, Palestiniens soudés à la terre de leurs ancêtres dans le village d'Ein Hod qui vit au rythme des récoltes d'olives. 

Leur destin bascule le jour où Ismaïl, leur petit second, est enlevé par un couple de colons en mal d'enfants. Rebaptisé David, Ismaïl est élevé dans l'ignorance de ses origines et dans la haine des Arabes. Le restant de sa famille, dépossédé et chassé de ses terres, est dirigé vers les tentes fragiles et vulnérables des camps de réfugiés. Quand et comment Ismaïl pourrait-il retrouver les siens ? Son frère Youssef est nourri par la haine de l'injustice et de la misère. Amal, établie aux États-Unis, vit le " rêve américain " mais reste hantée par l'amour de parents trop tôt disparus et le regret d'avoir fui sa Palestine. Bref, une belle fiction plus proche de la réalité que beaucoup de discours…

Ce long prélude littéraire autour des matins de Jénine était nécessaire dans cette ambiance médiatique qui incite à l’oubli…

 Le matin de Napoléon

Historiquement, il y avait bien plutôt un autre matin de Jénine, c’était en 1799, lors de la fameuse campagne d’Égypte du non moins fameux Napoléon.

Jénine était conquise par les troupes françaises, le lendemain matin Napoléon ordonnait à son armée d’incendier et de piller la ville…

Quand sont signés les accords d'Oslo en 1993 entre l’OLP et l’entité sioniste, le contrôle civil de la ville revient à l'Autorité palestinienne, mais sans que l'entité sioniste passe la main sur le contrôle militaire et des frontières revient.

Au début des années 2000, la ville est un bastion cisjordanien du mouvement du Jihad islamique et est réputée pour son grand nombre de résistants et de martyrs.

L’Incursion d’avril 2002

Au lendemain de l'attentat du 27 mars 2002 à l'hôtel Park de Netanya qui avait choqué l'opinion, l’incursion de l’armée de l’occupation a du faire face à une forte résistance palestinienne issue principalement de trois organisations palestiniennes armées : le Hamas, le Jihad islamique palestinien et les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, retranchés dans le centre du camp de réfugiés dont une partie a été rasée au bulldozer.

L’armée d’occupation avait coupé l’accès à l’eau, à la nourriture, à l’électricité, et interdit au personnel médical de pénétrer dans la ville, tout en procédant à des bombardements aériens et à des tirs d’artillerie et de missiles.

Les matins de 2023

Le matin du 26 janvier 2023, l'armée israélienne effectue un premier raid sur Jénine, tuant 9 personnes dans le camp de réfugiés. Le 6 mars, un second raid fait 6 morts.

Le 19 juin, 6 autres Palestiniens sont tués et 91 blessés, dont une vingtaine dans un état grave ou critique.

Comme d’habitude, l’armée d’occupation a empêché les ambulances d’accéder aux blessés. L’une d’elles a même été heurtée par un véhicule israélien. 

Le 21 juin, trois Palestiniens sont tués dans une attaque de drones israéliens.

Le 2 juillet, dix Palestiniens sont tués et une centaine blessés dans un nouveau raid israélien.

Le camp de réfugiés a été bombardé par drones, tandis que des troupes au sol attaquaient à l'aide de blindés. Plusieurs milliers de personnes fuient le camp.

Ainsi, de Napoléon à Ben-Gvir, seul l'armement change. La sauvagerie est la même et les matins de Jénine se ressemblent.  

 

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