Koweït: les grands travaux du nouvel émir

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Le prince héritier et émir adjoint du Koweït, le cheikh Meshal al-Ahmad al-Jaber al-Sabah, qui prêtera serment mercredi comme nouvel émir du pays, prononce un discours lors de la cérémonie d'ouverture de la 17e législature à l'Assemblée nationale (parlement) à Koweït City, le 31 octobre 2023. (Photo Yasser Al-Zayyat / AFP)

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Accablé par une économie atone, des querelles politiques et des réformes au point mort, le Koweït se retrouve à la traîne dans le Golfe: une réalité à laquelle le cheikh Mechaal al-Ahmad al-Jaber al-Sabah devra faire face en tant que nouvel émir.

Arrivé au pouvoir à 83 ans, ce vétéran de l'appareil sécuritaire du pays est un habitué des arcanes du pouvoir, ayant assumé la plupart des tâches de son prédécesseur ces deux dernières années.

Il devra prêter serment devant le Parlement mercredi.

Mais en succédant à son demi-frère, le cheikh Nawaf al-Ahmad Al-Sabah, décédé samedi, il "hérite d'un legs difficile" qui nécessite de vigoureux coups de pioche, a dit à l'AFP Issam Altawari, un analyste koweïtien.

"Les décisions des prochaines années vont déterminer si le Koweït prospérera ou non à long terme", a souligné pour sa part l'économiste et expert du Golfe Justin Alexander.

"Il s'agit notamment d'établir des politiques fiscales et économiques qui mettent le pays sur la bonne voie et (...) de dépasser les querelles politiques qui ont conduit le Koweït à sous-estimer son potentiel", a déclaré M. Alexander.

Le Koweït, frontalier de l'Arabie saoudite et de l'Irak, renferme 7% des réserves mondiales de pétrole. Peu endetté, il possède l'un des fonds souverains les plus solides au monde.

Cependant, il souffre de conflits constants entre les députés élus et les cabinets formés par la famille Al-Sabah, qui a une forte emprise sur la vie politique, malgré un système parlementaire en place depuis 1962.

L'immobilisme a empêché des réformes visant à diversifier l'économie, alors que les déficits répétés des budgets et la faiblesse des investissements étrangers ont ajouté à la morosité ambiante.

"Premier test" 

Selon M. Alexander, le "premier test" de cheikh Mechaal sera de choisir un prince héritier, la question centrale étant de savoir si le pays choisira une nouvelle génération de dirigeants.

Conformément à la Constitution, il disposera d'un an pour le faire. Dans l'immédiat, il devra choisir un nouveau Premier ministre pour former un nouveau cabinet.

Dans un discours en octobre devant une nouvelle législature, cheikh Mechaal a critiqué à la fois les élus et le cabinet pour ne pas avoir été à la hauteur des attentes.

Sur le plan intérieur, "la refonte du secteur public est (une) autre priorité évidente", a déclaré M. Altawri, car le Koweït souffre de dépenses publiques excessives et d'une bureaucratie surdimensionnée.

Le projet de budget 2023-2024 a alloué plus de 86 milliards de dollars aux dépenses publiques, dont 80% pour les salaires de la fonction publique et les subventions publiques.

Mais le 5 décembre, cheikh Mechaal a ordonné une pause de trois mois dans les recrutements à la fonction publique, qui pourrait être prolongée, indiquant ainsi son intention de s'attaquer à la racine du problème.

Selon Haila al-Mukaimi, professeur de sciences politiques à l'université de Koweït, la réforme des institutions de l'Etat sera l'une des principales priorités du cheikh Mechaal.

"Il fusionnera certains organes et en créera de nouveaux", a-t-elle déclaré, soulignant qu'il devrait également promouvoir la jeunesse au sein une administration longtemps dominée par la vieille garde.

L'après-pétrole 

Cheikh Mechaal a passé de nombreuses années au ministère de l'Intérieur et a été chef adjoint de la Garde nationale de 2004 à 2020.

Ayant passé l'essentiel de sa carrière dans l'appareil de sécurité, il s'est tenu à l'écart des querelles souvent âpres au sein de la famille princière.

Son succès dépendra en grande partie de la "coopération entre le gouvernement et le Parlement", a déclaré Badr al-Saif, de l'université du Koweït.

Contrairement à ses voisins saoudien et émirati, le Koweït n'a pas diversifié son économie et reste fortement dépendant du pétrole.

"Le principal projet devrait être de gérer en toute sécurité la transition vers une ère post-pétrolière", a expliqué M. Saif.

En politique étrangère, le statu quo sera de mise pour le Koweït, un allié des Etats-Unis qui entretient de bonnes relations avec l'Iran et ses voisins arabes du Golfe, notamment l'Arabie saoudite, d'après M. Saif.

"Tous les dirigeants du Koweït étaient conscients de l'importance stratégique des relations entre l'Arabie saoudite et le Koweït", a souligné Suleiman al-Okaily, un analyste saoudien.

"Cheikh Mechaal suivra sans aucun doute cette approche politique". (AFP)

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