Des éléphants dans un magasin de diplomatie

5437685854_d630fceaff_b-

Le devoir premier de A. Benkirane est de désavouer sans faux-fuyants une attitude marquée par la désinvolture et l’irresponsabilité

1
Partager :

De temps en temps, le Secrétariat général du PJD, empêtré dans ses luttes internes et dans son passif gouvernemental ne sait plus où donner de la tête. C’est alors qu’il commet n’importe quoi. Pour évacuer ses problèmes ou pour trancher une surenchère de ses courants, un mot trop fort puisqu’ils sont réduits à l’état groupusculaire, il empiète sur un domaine où il sait par définition et par principe que de tous les domaines réservés, c’est le plus strictement interdit, la politique extérieure du Royaume. 

La réaction, fulgurante, n’a pas tardé : Les relations extérieures relèvent du Roi et n’admettent ni chantage ni surenchères politiciennes, a dit le Cabinet royal dans un rare communiqué de ce genre.

D’abord parce que, explique le Cabinet Royal : l’instrumentalisation par le PJD de la politique extérieure du Royaume dans un agenda partisan interne constitue un précédent dangereux et inacceptable. Ensuite parce que les partis politiques et les forces vives ont bien été informés préalablement de la décision de reprise des relations avec Israël, et ont bien ses tenants et ses aboutissants

D’ailleurs, comprenant les enjeux, Abdalilah Benkirane, le chef de file du PJD, qui n’avait pas encore opéré son comeback à la tête du parti, dans un moment d’extrême lucidité, ce qui lui arrive parfois quand l’hubris le quitte, avait volé au secours de son frère ennemi, Saad Dine El Otmani qui, en sa qualité de chef du gouvernement à l’époque, est signataire de la déclaration tripartite de 2020. Benkirane ne lui avait-il pas apporté son adhésion sans réserve ? 

Ce que l’on trouve à Rabat, à raison, à la fois vexant outrageant, c’est qu’en prenant la voie détournée de critiquer l’action du ministre des Affaires étrangères  au sein des instances de l’UA, en feignant oublier que la diplomatie marocaine était en pleine bataille pour l’autonomisation et l’émancipation de cette organisation panafricaine des tutelles algérienne et sud- africaine, le PJD a commis l’impair difficilement pardonnable de confondre petits intérêts partisans et intérêts supérieurs de la Nation. Du pain béni pour la propagande algérienne dont les islamistes marocains reprennent les éléments de langage.

L’autre impair, tout aussi grave si ce n’est plus, c’est l’omission volontaire dans l’analyse péjidiste de la position de principe, constante et inaliénable, du Maroc, plusieurs fois réaffirmée, en faveur de la question palestinienne, celle-ci constituant une des priorités de l’action étrangère du Royaume, que le Souverain marocain, Amir Al-Mouminine et président du Comité Al-Qods, place au même rang que l’intégrité territoriale.

Dès lors on se demande ce que depuis la signature de l’accord tripartite a changé pour que le PJD s’autorise de remettre en cause un travail minutieusement mais laborieusement mis en place pour faire accepter une position conciliant intérêts nationaux et intérêts palestiniens.  C’est d’autant plus inadmissible qu’à Rabat on rappelle que le PJD représenté au sein des institutions, aurait dû privilégier le cadre et les canaux institutionnels et démocratiques, notamment au niveau des deux Chambres du Parlement, à travers les commissions compétentes et les mécanismes d’interaction avec le gouvernement, ce dernier, par la voix du ministère des Affaires étrangères, n’ayant jamais manqué de renseigner et d’éclairer les représentants de la nation à travers les mécanismes institutionnels et politiques.  

Silencieux sur les relations de la Turquie d’Erdogan et de son PJD avec Israël, filant sans états d’âme le grand amour, le PJD peut-il vraiment plaider la bonne foi, en ne trouvant pas mieux que de surenchérir sur l’attitude du Maroc à des fins bassement politiciennes ? Et pouvait-il honnêtement faire l’impasse sur cette décision d’Etat prise dans le contexte bien précis de la reconnaissance par l’administration américaine de la pleine souveraineté du Maroc sur son Sahara ? 

Le communiqué du Cabinet royal, en termes sévères qu’exige cette intrusion par effraction dans les relations internationales du Royaume, rappelle fermement que celles-ci ‘’ne peuvent être l’objet de chantage de la part de quiconque et pour quelque considération que ce soit ». Ni par ailleurs tolérer son instrumentalisation dans un agenda partisan interne. L’attitude du PJD constitue ainsi « un précédent dangereux et inacceptable ».

Le Palais recadre clairement le PJD et lui rappelle fermement ses responsabilités dans ses déclarations sur les relations maroco-israéliennes, ce qui induit un devoir incontournable de clarification et le respect scrupuleux de la hiérarchie des normes constitutionnelles, particulièrement dans l’actuel contexte international complexe, versatiles et en mutations imprévisibles.

Abdalilah Benkirane, pompier ou pyromane, le deux peut-être à la fois, a bien reçu le message et a exigé des ‘’siens’’ de se garder de tout commentaire jusqu’à la réunion à ce sujet du Secrétariat général. Aura-t-elle lieu ? On peut en douter tant on peut le soupçonner de tenter de jouer la montre pour que l’affaire rentre dans l’oubli. Mais son devoir premier est de désavouer sans faux-fuyants une attitude marquée par la désinvolture et l’irresponsabilité. Quid.ma

lire aussi