économie
La demande intérieure resterait le socle de la croissance économique estimée 2,9% au premier trimestre 24, L’inflation au plus bas depuis 21
La consommation des ménages se serait améliorée de 2,7%, au lieu de +0,1%, en variations annuelles
Rabat - La croissance économique nationale se serait établie à 2,9%, au premier trimestre 2024, soutenue par la progression de 4% de la valeur ajoutée non-agricole, selon le Haut-Commissariat au Plan (HCP).
Malgré l’inflexion à la baisse de la valeur ajoutée agricole, l’activité économique aurait poursuivi son amélioration, tirée principalement par la dynamique des branches secondaires et par l’affermissement continu des services, explique le HCP dans sa note de conjoncture du premier trimestre 2024 et perspectives pour le T2-2024.
Les activités agricoles auraient connu une régression de 3,9% au premier trimestre 2024, en variation annuelle, au lieu d’une hausse de 6,9% une année auparavant, fait savoir le HCP, notant que cette contreperformance aurait été attribuable aux conditions climatiques défavorables qui auraient entravé l’installation des cultures automnales et hivernales.
Les superficies semées de céréales auraient reculé de 42,5% par rapport à la moyenne quinquennale, se limitant principalement aux zones favorables dans le Saïs, le Loukkous et une partie du Gharb.
Les températures excessives enregistrées vers la mi-janvier 2024, conjuguées au déficit pluviométrique atteignant 46,2% à fin février par rapport à la même période d’une saison normale, auraient impacté le développement de la plupart des cultures pendant leurs stades végétatifs précoces et avancés, fait remarquer le HCP.
Selon la note, le retour des pluies au mois de mars, limitant le déficit pluviométrique depuis le début de la campagne agricole à 20,6%, aurait été bénéfique pour les rosacés et les maraichères de saison, mais n’aurait pas compensé les pertes enregistrées au niveau des cultures précoces.
Dans la filière animale, l’effort de reconstitution du cheptel, après le repli sensible enregistré pendant les trois dernières années, aurait été, également, compromis par la dégradation des parcours végétatifs et le déficit pluviométrique prolongé sur les cinq premiers mois de la campagne.
La relance de la production locale de viande rouge aurait été différée et l’approvisionnement du marché local serait resté dopé, pour l’essentiel, par les importations de bovins et d’ovins.
A l’inverse, les perspectives de croissance de la viande blanche se seraient relativement améliorées dans un contexte de repli du prix des aliments composés, en ligne avec la baisse du cours international du maïs de 35,5% au premier trimestre 2024, au lieu de -2,4% une année plus tôt, en variations annuelles.
La production des viandes de poulet de chair se serait accrue de 2,5%, en variation annuelle, au premier trimestre 2024, au lieu de +2,4% la même période de l’année précédente.
Au niveau du secteur secondaire, la hausse de la valeur ajoutée aurait atteint +6,3% au premier trimestre 2024, dopée par les effets d’entraînement du rebond technique des industries extractives sur les autres branches.
En variation annuelle, la valeur ajoutée minière se serait accrue de 11,2%, après -11,8% une année plus tôt.
Cette dynamique aurait été portée par une expansion de 28,3% de la production phosphatée, tiré par le renforcement de la demande des industries locales de transformation. Le bas niveau des stocks en engrais dans les pays de l’Amérique du Nord et la vigueur de la demande du Brésil auraient alimenté le regain du commerce international de fertilisants, favorisant une hausse des expéditions nationales de phosphate brut de 54,7% au premier trimestre 2024, en variation annuelle.
L’industrie manufacturière aurait, pour sa part, affiché une progression de 6,8%, en variation annuelle, au premier trimestre de 2024. Cette croissance, attribuable en partie à un effet de base mécanique, aurait été, principalement, le fait des filières de la chimie, du matériel de transport, du caoutchouc et des plastiques.
En revanche, l’activité de l’industrie agroalimentaire aurait poursuivi son déclin, bien qu’à un rythme moins prononcé que la période précédente (-2,2%). L’industrie du textile aurait maintenu sa trajectoire de baisse pour le troisième trimestre consécutif, en raison de la faible dynamique de ses ventes.
L’activité de la construction aurait, également, renoué avec une croissance plus robuste au premier trimestre 2024, enregistrant une progression de 3,7%, au lieu d’une baisse de 3,4% durant la même période de l’année précédente. Cette dynamique, impulsée principalement par les travaux publics, notamment les programmes de préparation pour la CAN 2025 et la coupe du monde 2030, ainsi que par les initiatives de reconstruction et de réhabilitation des zones affectées par le séisme d’EL Haouz, aurait été corroborée par une augmentation de l’utilisation des matériaux de construction, avec une hausse des ventes de ciment de 7,5%. Ce regain d’activité serait resté, toutefois, fragile, au regard du ralentissement continu de la demande des ménages.
Dans les branches tertiaires, l’activité aurait retrouvé depuis la mi-2023 son régime de croissance modérée d’avant 2020, après la reprise vigoureuse qui avait marqué les trois dernières années. Les services aux entreprises auraient conservé de l’allant, dans le sillage du redressement des activités industrielles, mais les services liés aux particuliers et l’activité du commerce auraient connu une croissance modérée.
Dans l’ensemble, la valeur ajoutée des branches tertiaires aurait crû de 3,1% au premier trimestre 2024, en variation annuelle, au lieu de +5,4% une année plus tôt.
La croissance prévue à 2,7% au deuxième trimestre 2024
La croissance économique nationale devrait s’établir à 2,7% au deuxième trimestre 2024, en variation annuelle, au lieu de +2,3% une année plus tôt, selon le HCP.
"Compte tenu d’une baisse de 4,1% de la valeur ajoutée agricole, l’activité économique nationale afficherait une croissance de 2,7% au deuxième trimestre 2024", explique le HCP dans sa note de conjoncture du premier trimestre 2024 et perspectives pour le deuxième trimestre de la même année, notant que la valeur ajoutée hors agriculture afficherait un accroissement de 3,7%, en glissement annuel.
Les branches secondaires poursuivraient leur regain au rythme de 5,3%, grâce notamment à la poursuite du rétablissement des industries extractives et de la construction, précise le HCP.
La production manufacturière devrait demeurer bien orientée, profitant d’une demande extérieure plus vigoureuse pour les branches de la chimie et du matériel de transport, fait savoir la même source, estimant que le rythme de croissance de l’activité industrielle pourrait, néanmoins, s’infléchir comparativement au début de l’année, du fait de la faible dynamique du textile et de l’agroalimentaire.
Quant aux services, leur rythme de croissance se maintiendrait aux environs de 3%, tiré principalement par les activités de l’hébergement et des services non marchands.
La demande étrangère adressée au Maroc s’améliorerait, ainsi, progressivement et les échanges extérieurs pèseraient moins lourdement sur la croissance économique nationale qu’au premier trimestre 2024, avec une contribution réduite à -3,1 points au lieu de -3,9 points le trimestre antérieur.
Ainsi, les exportations afficheraient une progression de 9,1%, profitant du regain de la demande étrangère, principalement européenne, fait savoir le HCP, soulignant que les importations conserveraient une vive allure, affichant une progression de 14,3%, sur fond d’alourdissement de la facture alimentaire et de la poursuite de la reprise de la demande d’équipement.
La demande intérieure resterait le socle de la croissance économique nationale au deuxième trimestre 2024, fait remarquer le HCP, qui estime que les gains de pouvoir d’achat, permis par le reflux de l’inflation, et le recours intensifié à l’épargne soutiendraient une augmentation de 2,6% de la consommation des ménages.
Les dépenses d’investissement conserveraient leur dynamique grâce au renforcement des dépenses publiques et à la poursuite de l’effort d’équipement des entreprises, dans un contexte de reflux des prix à l’import des biens d’équipement industriel.
A l’inverse, les investissements des ménages en logement resteraient en reflux, dans un contexte de persistance des coûts élevés de crédit comparativement à la période d’avant 2022.
La demande intérieure confirme sa reprise au premier trimestre 2024
La demande intérieure aurait confirmé sa reprise au premier trimestre 2024, contribuant pour 6,7 points à la croissance économique globale, au lieu de -0,1 point au même trimestre de l’année passée, selon le HCP.
D’après la note de conjoncture du HCP, la consommation des ménages se serait améliorée de 2,7%, au lieu de +0,1%, en variations annuelles.
Cette augmentation, attribuable en partie à un effet de calendrier associé à l’augmentation des dépenses de consommation pendant et à la veille du mois de Ramadan, aurait bénéficié des gains du pouvoir d’achat liés au reflux de l’inflation.
Elle aurait, principalement, profité aux produits alimentaires et aux produits finis de consommation importés, précise le HCP, soulignant que les appréciations des commerçants de gros sur leurs ventes de produits alimentaires et de boissons, collectées dans le cadre de la dernière enquête de conjoncture, se seraient améliorées de 24,6 points, en variation annuelle, alors que celles des biens domestiques et agricoles se seraient toujours maintenues sur une tendance baissière.
La consommation des administrations publiques se serait, pour sa part, accrue de 3,4%, au lieu de +2,7% au même trimestre de l’année précédente, en ligne avec l’accroissement des dépenses de fonctionnement.
Et de relever que la contribution de la demande extérieure nette serait restée négative au premier trimestre 2024, s’élevant à -3,9 points, sous l’effet d’une hausse de 17,3% du volume des importations nationales de biens et services et de 8,4% de celui des exportations, en variations annuelles.
L’investissement aurait, quant à lui, vu sa dynamique de croissance se poursuivre à un rythme soutenu pour le troisième trimestre consécutif, avec une hausse de 17,3% de la formation brute de capital au premier trimestre 2024.
Les entreprises, bénéficiant d’une amélioration impulsée par l’inflation de leurs marges à la fin de 2023, auraient, également, renforcé leur recours à l’endettement bancaire pour financer leurs projets d’investissement.
A fin février 2024, les crédits à l’équipement auraient enregistré une hausse de 10,8%, en variation annuelle, au lieu de -4,6% au cours de la même période de l’année passée.
Les investissements dans le secteur de la construction auraient, également, été mieux orientés, grâce à l’impulsion des programmes publics relatifs à l’aménagement des stades pour la CAN 2025, à la reconstruction et la réhabilitation des zones touchées par le séisme d’El Haouz, ainsi que du programme d’aide à l’acquisition de logements.
L’inflation au plus bas depuis le deuxième trimestre 2021
L’inflation aurait poursuivi sa tendance baissière pour s’établir, au premier trimestre 2024, à son niveau le plus bas depuis onze trimestres (+1,1%, soit 2,7 points de moins qu’au trimestre précédent), selon le HCP.
Cette détente des prix aurait résulté d’un ralentissement marqué des prix des produits alimentaires, refluant à +1,4% sur un an, après avoir atteint +7,7% un trimestre auparavant, et d’une moindre augmentation des prix des produits non-alimentaires, revenant à +0,9% sur un an, contre 1% enregistrée au quatrième trimestre 2023..
Parallèlement, l’inflation sous-jacente, qui exclut les prix soumis à l’intervention de l’Etat et les produits à prix volatils, aurait connu une évolution semblable, mais à un rythme moindre comparativement à celui de l’inflation globale, atteignant +2,5% au premier trimestre 2024, après +3,7% un trimestre plus tôt, profitant de l’allègement des pressions inflationnistes dans l’alimentation (hors produits frais) et du recul des prix des produits manufacturés, précise le HCP.
Les prix alimentaires, en forte hausse l’an dernier, auraient constitué le principal moteur du recul de l’inflation, grâce notamment à la baisse des prix des produits frais avec une contribution de -0,6 point, surtout celle des légumes frais et des agrumes.
L’augmentation de la disponibilité sur le marché, occasionnée, en partie, par l’alternance du cycle de production de certaines cultures et une hausse des importations, auraient entraîné un apaisement des tensions sur leurs prix.
Hors produits frais, la poursuite du ralentissement des prix, en particulier des produits à base de céréales et des huiles de table, attribuable au repli de leurs prix à l’international, aurait, également, soutenu la décélération continue de l’inflation.
De son côté, le relèvement habituel des prix du tabac, au mois de janvier, aurait été moindre que celui enregistré une année auparavant (+2,2%, au lieu de +5,4% un an plus tôt).
S’agissant des prix des produits non-alimentaires, le ralentissement aurait marqué plus sensiblement les produits manufacturés (+0,6%, contre +1,6% au trimestre précédent) et, dans une moindre mesure, ceux des services (+1,1%, après +1,2%).
Il aurait été, essentiellement, tiré par l’ajustement à la baisse des prix des produits pharmaceutiques au mois de janvier (-0,1 point de contribution à l’inflation), dans un contexte de réduction de la TVA sur ces produits. A l’inverse, les prix de l’énergie auraient quasiment stagné (-0,1%), après le repli de 1,5% enregistré au trimestre précédent.
La masse monétaire progresse de 4,4% au premier trimestre
La masse monétaire se serait accélérée au premier trimestre 2024, affichant un accroissement de 4,4%, après +3,9% un trimestre auparavant, en glissements annuels, selon le HCP.
Le besoin de liquidité des banques se serait remarquablement accentué, à la suite de la hausse de la circulation fiduciaire et de la faible croissance des réserves de change, notant que Bank Al-Maghrib aurait élevé le volume de ses financements aux banques.
Les avoirs officiels de réserve n’auraient augmenté que de 0,5%, malgré l’emprunt obligataire du Trésor opéré en 2023 sur le marché financier international, estime le HCP, soulignant que les créances nettes sur l’administration centrale auraient poursuivi leur baisse, traduisant un désendettement monétaire partiel du Trésor de 1,3%.
Les créances sur l’économie se seraient accélérées au premier trimestre 2024. Leur encours aurait augmenté de 6,5% en glissement annuel, après +5,2% enregistré un trimestre plus tôt.
Cette évolution aurait été attribuable, notamment, à l’amélioration progressive des crédits de trésorerie aux entreprises et à l’accélération des crédits à leur équipement. Bank Al-Maghrib aurait continué de maintenir stable son taux directeur à 3% en mars 2024.
Cette démarche intervient dans une conjoncture de repli des tensions inflationnistes au niveau national.
Les taux d’intérêt sur le marché interbancaire se seraient stabilisés au niveau du taux directeur, élevant leur niveau moyen de 44 points de base, en variation annuelle. Par contre, les taux auraient décru sur le marché des adjudications des bons du Trésor, avec des baisses de 47 points, 57 points et 59 points de base respectivement pour les taux de maturité 1 an, 5 ans et 10 ans. Pour leur part, les taux créditeurs auraient limité leur croissance à 21 points de base en moyenne.
Sur le marché de change, le dirham se serait apprécié de 2,7% et 1,6% respectivement vis-à-vis du dollar américain et de l’euro.