chroniques
Les vrais défis
Il faut être aveugle ou pire, refuser de voir, pour ne pas se rendre compte que les vrais défis dépassent la place du PJD dans la construction démocratique et concernent l’avenir et la stabilité du pays
Benkirane va-t-il jeter les clés ou accepter de remplacer le PAM au sein de la majorité qui s’est constituée au parlement ? C’est la seule question qui vaille et s’il était homme d’Etat il aurait rapidement fait son choix. Cette histoire de constitution du gouvernement occulte des enjeux stratégiques autrement plus importants.
Selon les services américains, il y a dans la région deux pays menacés de devenir des « Etats défaillants ». L’Algérie et la Mauritanie. C’est-à-dire nos deux voisins. Contrairement à ceux qui mélangent chauvinisme et patriotisme, les rationnels y trouvent une vraie source d’inquiétude, ne serait ce que sur le plan sécuritaire.
Sur le plan diplomatique, l’Egypte, un Etat en voie de défaillance, du putschiste Sissi s’allie avec l’axe Algérie-Afrique du Sud contre nous. C’est une autre histoire qui commence. Le consensus, qui a prévalu depuis quarante ans, c’est de ne pas polluer la ligue arabe avec la question du Sahara. L’Egypte de Sissi est en train de rompre le consensus. Cet Etat-mendiant, dirigé par un nouveau Kadhafi, se croit encore le centre du monde. Mais il nous causera des tracas, avant qu’il ne soit éjecté par son peuple parce que la situation des pauvres y est intolérable.
Sur le plan économique, Bank Al Maghrib et le Haut commissariat au plan nous indiquent tous les deux qu’il y a un problème de modèle de développement, que la demande extérieure baisse, et que donc notre compétitivité se détériore. Mais tout va bien puisque grâce à la pluie nous allons faire 3,7 % de taux de croissance. Le chômage augmente, la précarité aussi. Le Haut commissaire Lahlimi a trouvé un moyen de dire que « le niveau de vie augmente même si les intéressés n’ont pas ce ressenti ». Cet autisme est extraordinaire. Le ressenti des gens n’est pas une statistique, c’est le propre de la vie. Quand on dit qu’a partir d’un revenu de 3000 Dh mensuel on est dans la classe moyenne, on est soit totalement off shore, soit fou à lier. La classe moyenne ce sont des populations pouvant subvenir à tous leurs besoins, se permettre une épargne ou une consommation en loisirs. Comment y arriver avec 3000 dhs ? Les statistiques, les analystes, nous mentent. La croissance n’est pas le développement, elle n’en est qu’un élément. Encore faut il que celle-ci profite à tous, irrigue tous les secteurs et permette un partage de valeurs et de la richesse crée. Il y a au Maroc de rares économistes pour dire ces vérités premières. On va dans le mur en klaxonnant, au nom des recettes qui n’ont marché nulle part.
Enfin, l’Education et la santé sont en faillite et les projets de réforme sont de vrais syndics de liquidation. Il faut être aveugle ou pire, refuser de voir, pour ne pas se rendre compte que les vrais défis dépassent la place du PJD dans la construction démocratique et concernent l’avenir et la stabilité du pays.