Les Istiqlaliens face à leur destin

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L’image tend au pathétique. L’ensemble des membres de l’instance exécutive de l’Istiqlal entourant Hamid  Chabat alors que le porte parole du parti est en train de lire un communiqué de soutien au leader. L’exercice fait sourire les agences spécialisées en communication politique. « On a vu mieux comme riposte en termes de communication. Et dans le style « on est tous derrière Hamid Chabat », il y a des formes qui passent mieux que la vidéo qui a été postée lundi par les istiqlaliens ! », s’exclame cette communicante.

L’Istiqlal est très vite monté au filet, organisant sa riposte bruyante et maladroite. Après le communiqué cinglant du ministère des affaires étrangères qui recadre le leader istiqlalien sur la question de l’intégrité territoriale et le respect des frontières de la Mauritanie, Chabat convoque un comité exécutif. L’instance exécutive rend public un communiqué de défense du leader dont, explique-t-on, la déclaration relative à la Mauritanie a été sortie de son contexte. Dans la foulée, le locataire du ministère des affaires étrangères et le parti auquel il appartient, le RNI, est copieusement égratigné. Coup monté contre l’Istiqlal, le parti que certains veulent abattre : c’est la petite musique que font valoir, tout au long de la journée, Hamid Chabat et les membres du comité exécutif, prêts à tout pour un maroquin ministériel en ces temps de listes qui se font et défont

Dès lundi,  Abdelilah Benkirane, lui, sait déjà que l’affaire Chabat Vs Mauritanie est très sérieuse. « On n’avait pas besoin de ce dérapage. Ce qui vient de faire Hamid Chabat complique la donne de la formation du gouvernement », confie le chef de gouvernement désigné à son entourage.

Les appréhensions du leader du PJD sont fondées. Mardi, Mohammed VI a un entretien téléphonique avec le président mauritanien. « Le Maroc reconnait l’intégrité territoriale de la République Islamique de Mauritanie, conformément au Droit international », a rassuré le Souverain. Et 24 heures plus tard, le Roi dépêche le chef de gouvernement et le ministre délégué aux affaires étrangères en Mauritanie. « Les propos tenus par M. Chabat sont irresponsables, » déclare M. Benkirane devant les micros de la presse mauritanienne.

Le secrétaire général de l’Istiqlal comprend qu’il  est lâché par un chef de gouvernement qui faisait de sa participation gouvernementale un enjeu non négociable. Il appelle à la réunion extraordinaire d’un comité exécutif qui devrait en principe se réunir ce jeudi 29 décembre. Dans la foulée, un éditorial faisant office d’excuses de Hamid Chabat est publié sur les colonnes d’Al Alam, le journal porte-parole de l’Istiqlal. Lâché par Benkirane, le leader istiqlalien l’est aussi par la direction historique du plus vieux parti marocain. Abbas Al Fassi, l’ancien premier ministre et secrétaire général de l’Istiqlal, rompt le silence politique auquel il s’était astreint. Il est le premier à lui porter l’estocade dans une mise au point envoyée à la presse. « Personne n’a décidé à la place des istiqlaliens pour le gouvernement de 2012. Les déclarations de Hamid Chabat sont fausses et infondées », fera-t-il savoir en substance avant de conclure, assassin, que «  le parti a payé cher son retrait du gouvernement comme l’ont prouvé les résultats des dernières élections communales et législatives ».

La photo de famille des dirigeants istiqlaliens  entourant Hamid Chabat au lendemain du communiqué cinglant du ministère des affaires étrangères a vite fait de se fissurer. Taoufik Hejira, le président du conseil national de l’Istiqlal rend publique une déclaration pour signifier «  être tombé dans une mauvaise appréciation quant à la dangerosité des propos du SG et à leur impact sur nos relations, solides et pérennes, avec la Mauritanie». Courage politique ou opportunisme ambiant, l’histoire jugera. Autre ancienne ministre qui quitte la photo de famille, Yasmina Baddou.

"Les propos tenus  par Hamid Chabat sont irresponsables et peuvent avoir des conséquences très graves pour l’intégrité territoriale du Maroc, qui est un des trois fondements du parti de l'Istiqlal. Notre responsabilité est de dénoncer son attitude, qui ne nous engage pas et nuit à notre parti. Même si Chabat a prétendu avoir le soutien des cadres du parti, nous nous désolidarisons complètement de lui" a en effet affirmé l’ancienne ministre de la santé à nos confrères de « Medias 24 ».

Adil Douiri, visage  de la relève istiqlalienne, a lui choisi de s’exprimer dans une tribune libre publiée par le quotidien « L’économiste » et de ne pas insulter l’avenir. Son avenir politique ? Celui qui a été ministre du tourisme sous le gouvernement Jettou ne se désolidarise pas vraiment avec le Secrétaire général de sa famille politique.  L’histoire de ce parti, écrit-il, « lui impose de toujours prendre de la hauteur, du recul et d’adopter des positions sages. La mesure, la modération et la pondération doivent dicter notre comportement ». Crise diplomatique ou pas, Adil Douiri n’en oublie pas pour autant l’impérieuse nécessité de la formation d’un gouvernement, avec ou sans l’Istiqlal, précise-t-il.

La crise diplomatique avec la Mauritanie finira-t-elle par emporter l’incontrôlable Hamid Chabat ? Sa capacité de nuisance –sa forme à lui de résilience- aura-t-elle le dernier mot ? Plus que jamais, les Istiqlaliens sont face à leur destin.

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