LE RETOUR DES CLIMATOSCEPTIQUES - Par Mustapha SEHIMI

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Ceux qui ont pris le virage climasceptique n'ont pratiquement et curieusement aucun mot pour "Big Oil" et l'industrie des énergies fossiles. En revanche et à la place, ils prêtent des intentions totalitaires au Forum économique mondial, le rendez-vous annuel à Davos des principaux décideurs de la planète planifiant une grande réinitialisation " de l'ordre mondial actuel

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GESTION TRAUMATIQUE - Par Mustapha SEHIMI

Le climatoscepticisme est-il mort ? Pas le moins du monde : vive le climatoscepticisme ! Depuis la signature de l'Accord de Paris en 2015, la contestation du consensus scientifique autour de la responsabilité humaine dans le dérèglement climatique paraissait s'estomper dans le débat public. 

Mais elle a ressurgi de manière spectaculaire même sur les réseaux sociaux depuis deux ans. A telle enseigne que ce type de discours était porté par 30% des comptes actifs selon une analyse du CNRS (France). Ce renouveau, si l'on ose dire, est porté surtout par une nouvelle génération, plus engagée sur la Toile, qui s'est appropriée les discours anti-totalitaires.

"Dictature climatique "

Historiquement, les arguments niant le changement climatique - ou la responsabilité humaine dans ce phénomène - regardaient trois grands types d'acteurs: des lobbys industriels, des conservateurs et des scientifiques mais en marge de leur communauté. Pour les représentants des industries polluantes, prévaut surtout le dénigrement de l'État-providence. L'enjeu ? Éviter que l'État, convaincu de leur responsabilité dans la dégradation de l'environnement, ne régule, voire ne réduise, leur activité. Telle est en particulier la position des conservateurs américains soucieux de protéger le libre marché et ce pour des raisons à la fois clientélistes et idéologiques. Enfin, le troisième groupe de climatosceptiques: celui de scientifiques, convaincus que leurs homologues pacifistes et écologistes étaient des agents doubles au service de l'ennemi russe, défenseurs de son "modèle". Anticommunistes, ils se sont recyclés dans la lutte anti- climatique. Ce que l'ancien ministre français, Luc Ferry, dénonce comme étant les "khmers verts" ou encore, par d'autres" comme les "pastèques, verts dehors, rouges dedans " … 

A noter encore, dans cette même ligne, que des influenceurs "antisystème" ont évolué récemment, passant de la dénonciation de la "dictature sanitaire" à celle de "dictature climatique". Aux États-Unis, l'on retrouve cette anxiété nourrie de "complotisme". L'écho est tout particulier chez les militants de Trump et du trumpisme. Mais ce mouvement ne manque pas de contradictions: tant s'en faut. Lors du covidoscepticisme et de la pandémie du Covid 19, la critique portait abondamment sur "Big Pharma", désignant l'industrie pharmaceutique. Mais aujourd'hui ceux qui ont pris le virage climasceptique n'ont pratiquement et curieusement aucun mot pour "Big Oil" et l'industrie des énergies fossiles. En revanche et à la place, ils prêtent des intentions totalitaires au Forum économique mondial, le rendez-vous annuel à Davos des principaux décideurs de la planète planifiant une grande réinitialisation " de l'ordre mondial actuel.

La "science " du climat: un déni..

Tout paraît se passer comme si la "science" du climat, avec la panique du changement qu'elle nourrit, n'avait pas sa place et qu'elle serait ainsi une construction politique et idéologique contestable. Elle est complexe; elle repose sur des modèles informatiques, mais elle pèche par une défaillance majeure: celle de la mauvaise compréhension de l'apport de vapeur d'eau. De quoi s'agit-il ? Du fait qu'elle est le gaz à effet de serre le plus important en raison de sa capacité présumée de "rétroaction": elle a accélère en effet le réchauffement bien au-delà de ce que le CO2 serait en mesure de faire à lui seul. La fiabilité des modèles climatiques est ainsi à corriger; elle permettra alors de fournir des projections hydroclimatiques précises, utiles pour régions arides/ semi-arides dans les décennies à venir. 

État-nations et gouvernance mondiale ?

Cette donnée sera-t-elle prise en compte par les pouvoirs en place, aux États-Unis, en Europe ou encore au sein du trop puissant Forum de Davos?  Certains en doutent. Ils invoquent que le caractère anxiogène donné au changement climatique permet à des gouvernements et à des ONG d'influer sur les politiques publiques, de démembrer le pouvoir des États-nations pour le confier à la gouvernance mondiale: celle de l'ONU, de l'OMS, avec le World Economic Forum comme intermédiaire. Des études affinées ont montré que ce sont les franges les plus conservatrices et identitaires des sociétés Occidentale qui sont majoritairement climatosceptiques. Ce serait un nouveau populisme. Les réseaux du déni du changement climatique sont multiples. L'on parle de "Carbon Club" pour reprendre le vocabulaire des ONG environnementales: des groupes de pression organisés notamment autour de l'industrie du charbon, du pétrole et du gaz de schiste; des think tanks américains très hostiles aux écotaxes et aux quotas de carbone, etc. A l'international, il faut encore citer une coalition baptisée " Clexit" qui se présente comme " une nouvelle organisation visant à empêcher la ratification du traité coûteux et dangereux de Paris sur le réchauffement de la planète" avec des membres dans vingt-six pays. Sur les réseaux sociaux, l'on a relevé la virulence des comptes climatosceptiques sur Twitter et leur progression après le rachat du réseau par Elon Musk en octobre 2022. Le déni a de belles perspectives devant lui, regroupant au moins trois tendances: climato- dénialiste/ dénégateur, climato- dénialiste/ niant l'attribution, et climato-dénialiste/ niant les impacts. Un menu à la base mais... à la carte !

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