Sur un invitation de Hô Chi Minh – Par Seddik Maaninou

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S. Maaninou dans l’ancien temple, "l’université" qui a formé tout au long des siècles penseurs et précepteurs

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Par Seddik Maaninou

Je reviens du Vietnam avec des impressions contradictoires. Avec cette visite, j'ai réalisé un rêve que je nourrissais depuis un demi-siècle sur fond d’une admiration pour la lutte vietnamienne pour la libération et l'unité. J’ai découvert un aéroport de Hanoï bondé de visiteurs et de longues files d'attente. J'ai attendu une heure et demie avant d'obtenir le sésame d’entrée de la police militaire. Le visa délivré par l'ambassade vietnamienne à Rabat commence le jour de l'arrivée et se termine le jour du départ, pas un jour de plus. 

Hanoï, la capitale, compte dix millions d'habitants et cinq millions de motos. Peu de voitures en revanche. Les bâtiments de la ville sont dans un état de délabrement visible et ses rues sont bondées. Sur leurs bords, assis sur de petites chaises en plastique, des milliers d’habitants f, sandales en caoutchouc pris sur les pneus de voitures aux pieds, vaquent à des occupations indéfinies. Les caméras de surveillance sont omniprésentes, et sous leur regard indiscret des milliers de "vendeurs ambulants" proposent des marchandises chinoises bon marché."

Cité des musées

"À Hanoï, il y a un grand nombre de musées. J'ai visité le musée culturel, qu’abrite un ancien temple, une sorte "d’université" qui a formé tout au long des siècles penseurs et précepteurs. Mon guide m'a expliqué que : "Ce temple est une institution culturelle et scientifique. Ceux qui en sortent sont préparés pour assumer de grandes responsabilités nationales et régionales." J'ai également visité le musée de la femme, un grand édifice où l’on peut contempler des photos des femmes qui ont participé à la guerre de libération. Des hommages soulignent leur courage dans le soutien à la révolution. Comme 80 % de la population est bouddhiste, j'ai visité un "temple bouddhiste" dont la construction remonte à loin dans le temps. Mon accompagnateur a appris que : "Les enfants viennent dans ce temple à l'âge de huit ans et y étudient jusqu'à dix-huit. Après cela, ils choisissent de continuer dans la voie de l’adoration ou de s'intégrer dans la vie publique." J'ai prié al-asr (prière du milieu de l'après-midi) dans le silence du temple propice à la méditation.

Le quartier politique 

J'ai interrogé mon guide sue le mausolée de Hô Chi Minh, le leader de la résistance vietnamienne. Il m'a dit qu’il est situé dans le "quartier politique", où se trouvent les principaux ministères, comme ceux de la Défense, de l'Intérieur, de la Présidence et du Parti. Ce quartier est sous la stricte surveillance de l'armée et l'accès se fait par des portails électroniques. Le bâtiment le plus important est celui du "Ministère de la Politique", qui contrôle tous les services de police et de renseignements." Les Vietnamiens ne sont pas autorisés à accéder à ce quartier ou à passer devant le mausolée de Ho Chi Min. J'ai visité "le quartier politique" et en y entrant, je me suis spontanément souvenu du jour où je suis entré dans Berlin-Est dans les années 60 du siècle dernier. Je n'ai pu voir que de loin le mausolée, dont la visite faisait partie des motivations de mon voyage Vietnam. J’ai dû me contenter d’une photo à distance avec le mausolée.

Une seule route

Entre Hanoï, la capitale et Saigon à l'extrême sud, il n'y a qu'une route nationale pour relier les deux villes. Pour la traverser en voiture, il faut 42 heures, trente-huit en train. Je n’ai pu que constater que les infrastructures de transport au Vietnam n'ont pas été mises à jour, ni réparées depuis l'époque coloniale.

Ne buvez pas l'eau.

Les habitants de "Saigon" refusent de nommer leur ville "Hô Chi Minh", pour des raisons historiques et idéologiques. "Saigon" est la plus grande ville du Vietnam avec 14 millions d'habitants et neuf millions de motos. Ses avenues, ses magasins, ses rues propres, ses bâtiments modernes pour les banques, ses entreprises et ses hôtels de grande qualité en font une ville agréable qui détone. "Saigon’’ représente 36 % de l'économie nationale et ses rues sont dépourvues de vendeurs de rue. Mais chose étrange, comme c'est le cas dans le reste du pays, il n'y a pas d'eau potable dans les maisons, les restaurants et les hôtels. Lorsque vous descendez de l'avion, le premier conseil de l’accompagnateur est : "Ne buvez pas l'eau du robinet". Au Vietnam, les gens bouillent leur eau à la maison ou achètent de l'eau purifiée dans des bouteilles en plastique. À "Saigon'', comme dans toutes les villes que j'ai visitées, j'ai remarqué des fils électriques et téléphoniques suspendus dans les airs, le long de la route... effrayants et gênants. Les habitants du pays les appellent "les toiles d'araignées". Il y a un énorme écart de développement entre le nord et le sud, c'est pourquoi le parti a décidé d'arrêter toute aide fournie au sud et de la transférer pour soutenir le nord."

La guerre des tunnels 

Dans la banlieue de "Saigon", j'ai visité "les tunnels" construits par les résistants de la guerre du Vietnam, s'étendant sur 250 kilomètres. Ils sont répartis sur trois niveaux et comprennent des zones de résidence, de rassemblement, de réparation de machines, de stockage de nourriture et d'armes. Il y a des hôpitaux et des cuisines à l'intérieur. L'accès aux tunnels se fait par des entrées difficiles à trouver. Les Américains contrôlaient la région le jour, et le Front de libération nationale régnait sur les lieux la nuit. Les entrées des tunnels sont conçues pour des corps maigres, trop étroites pour qu'un soldat américain puisse passer. Certaines étaient piégées pour exploser lorsqu'on tente de les ouvrir. Au Vietnam, vous ne voyez pas une seule personne corpulente, à croire que les habitants connaissent une forme de famine. Le régime alimentaire dépend de diverses plantes, herbes et racines. Des millions de Vietnamiens n'ont jamais mangé de viande.

L'avion a décollé 

Il pourrait sembler d'après ces observations que nous sommes face à un pays faible, incapable de progresser après sa victoire durant la guerre. Mais en réalité, la "sérieux" caractérise la vie des habitants et le travail est leur prière quotidienne. En 2022, le Vietnam a exporté plus de 300 milliards de dollars. Il est le deuxième exportateur mondial de riz, thé, café, noix de cajou, etc. Le Vietnam a ouvert ses portes aux capitaux étrangers, ses usines produisent des vêtements et des chaussures. Il a enregistré un excédent commercial estimé à 20,19 milliards de dollars au cours des huit derniers mois de 2023. Les États-Unis, l’ennemi d’hier, sont restés le principal marché à l’export du Vietnam, avec un chiffre d’affaires estimé à 62,3 milliards de dollars. La Chine a maintenu sa position de plus grand marché d’importation, avec un montant estimé à 68,1 milliards de dollars. Le tourisme est un pilier central du développement, accueillant chaque année 14 millions de touristes avec d'excellentes installations et des programmes de divertissement sophistiqués supervisés par un personnel extrêmement courtois et professionnel. Vous pouvez dépenser autant de dollars que vous le souhaitez au taux de change officiel du dong, la monnaie locale. Ce qui n’est pas dépensé est reconvertible en dollars. Le Vietnam est un avion qui a décollé et qui ne cesse de prendre de l’altitude. Je reviendrai sur ce sujet sous d'autres aspects.

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