Emmanuel Macron, l’arrogance et l’autisme faits chef d’Etat - Par Bilal TALIDI

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C’est à Josep Borrel, haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, toujours prêt à servir, qu’a échu l’explicitation de la pensée d’Emmanuel Macron.

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Le Patient et l'intempestif - Par Bilal TALIDI

Deux jours avant le coup d’Etat au Gabon, le président français Emmanuel Macron a réuni les ambassadeurs de son pays à Paris pour leur exposer les grandes lignes de la nouvelle politique étrangère de la France en Afrique du Nord, dans la région sahélo-saharienne et au Moyen-Orient.

Normalement, cette réunion annuelle des ambassadeurs aurait dû marquer une pause pour la révision et la recherche de nouvelles pistes en vue d’extraire la politique étrangère française du bourbier dans lequel elle s’est elle-même embourbée, surtout que les critiques accusant Macron d’arrogance et de mauvaise appréciation des mutations à l’œuvre dans le monde, et plus particulièrement en Afrique, fusent de partout.

C’était trop demander. Son allocution devant ce caucus diplomatique a été décevante à la hauteur de son autisme habituel. Ainsi, au lieu d’interagir positivement avec les critiques émanant, non seulement des médias et d’éditorialistes de renom, mais d’anciens chefs d’Etat et de responsables dans l’appareil diplomatique de son propre pays, il a préféré se boucher les oreilles pour ne pas avoir à reconnaître ses erreurs politiques et de les faire endosser aux autres. Jupiter peut-il ne pas être infaillible ? 

Evoquant la relation avec le Maroc, les propos de Macron étaient d’un pathétique inégalable. Pour justifier son échec à sortir les relations de son pays avec l’Algérie des pesanteurs de leur histoire commune, en même temps que son incapacité à maintenir la relation stratégique traditionnelle avec le Maroc, il n’a pas trouvé mieux que de s’en prendre à ce qu’il appelle «une crise de la région et de son organisation». Comme si la France n’avait pas, pendant un demi-siècle, profité de cette crise d’organisation justement, en s’investissant à fond ce qu’on appelle par euphémisme ‘’un conflit de basse intensité’’ entre Rabat et Alger, pour mieux asseoir son influence, au nom d’une prétendue habile gestion des équilibres en Afrique du Nord !

L’arrogance caractéristique de Macron, de l’aveu même grand nombre de ses concitoyens, lui interdit d’appeler les choses par leurs noms. Il refuse de voir que Le problème est sans rapport avec une quelconque crise d’organisation, mais tient à un tournant que sa France n’a pas su négocier, si bien qu’elle a fini par se retrouver devant le choix entre Rabat et Alger, sachant que pour le Maroc le dossier du Sahara  est le prisme qui conditionne et évalue les amitiés et les partenariats avec les autres pays.

L’attitude autruchienne de M. Macron ne se limite pas à l’Afrique du Nord. Elle s’étend à tout le continent. La conséquence en est qu’il occulte l’énorme catastrophe qui secoue la diplomatie française en Afrique. Enfourchant son discours condescendant pour donner l’illusion que la France est toujours une puissance influente capable d’immuniser ses intérêts dans la zone sahélo-saharienne, il ne s’est étalé devant ses ambassadeurs sur la grandeur historique de la France, osant la prétention que c’est à la France que le Niger, le Mali et le Burkina Faso doivent la préservation de leurs frontières actuelles. Sans rien dire des limites de l’intervention française qui n’a non seulement rien réglé en 10 ans de présence, mais n’a même pas pu contenir la progression terroriste vers d’autres pays de la région menaçant de s’installer au bord de l’Atlantique, menace contre laquelle le Secrétaire général de l’ONU n’a cessé d’alerter. 

Ne voulant rien voir de l’hostilité populaire à son pays au Niger, M. Macron a signé et persisté dans son ingérence dans les affaires d’un Etat en principe souverain, incitant les autres Etats de la CEDEAO à l’intervention militaire, au risque d’un embrasement de la région, pour restaurer Paris dans son influence ante.  

Dans ce fatras d’affabulations et de morgue, il faut reconnaitre qu’il a eu raison sur un point : la crainte d’une épidémie de coups d’Etat dont le ‘’patient zéro’’ n’est pas le Mali comme on veut le faire croire, mais la Guinée Conakry, avec la bénédiction inavouée de la France.  Deux jours après son allocution devant les ambassadeurs, un coup d’Etat au Gabon a mis fin au règne de la famille Bongo, qui maintient des relations stratégiques intimes avec la France. 

Les observateurs ayant suivi le développement des positions de Paris et de l’Union européenne au sujet du coup d’Etat au Gabon n’auront pas manqué de constater la différence de traitement avec le putsch du Niger. On a assisté à une condamnation et une fermeté à géométrie variable, sans se soucier de l’eau bénite qu’elle apporte au moulin des masses africaines hostiles à La France. 

Et c’est à Josep Borrel, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, toujours prêt à servir, qu’a échu l’explicitation de la pensée macronienne.  Sans gêne aucune, le diplomate qui a repris à son compte la théorie du ‘’jardin et de la jungle’’ dans les relations internationales, a défendu la différence entre les deux coups d’Etat au Niger et au Gabon, estimant que ce dernier, faisait suite à des élections entachées «d'irrégularités». «Naturellement, les coups d’Etat militaires ne sont pas la solution, mais nous ne devons pas oublier qu’au Gabon il y avait eu des élections pleines d’irrégularités», a-t-il affirmé, soutenant qu’une élection truquée pouvait être interprétée comme un «coup d’Etat institutionnel». Pour paraphraser un illustre français, Jean de La Fontaine dans Les animaux malades de la peste, on dira : Selon que vous êtes de son côté ou non, les déclarations des diplomates vous blancs ou noir.

Entre l’arrogance du discours de Macron devant la réunion annuelle des ambassadeurs de son pays, notamment quand il s’est agi du Niger, et la retenue de la politique étrangère de la France à l’égard du Gabon, une kyrielle d’interrogations s’imposent. La plus que nuance entre les deux attitudes est-elle due :

  • à la manière avec laquelle les putschistes du Niger et du Gabon auraient ménagé les intérêts français, ou à la conviction de la France que toute intervention militaire serait inutile, voire impossible dans les deux cas de figure ? 

  • Ou est-ce parce que dans l’un, on feint de soupçonner la main de la Russie et dans l’autre, on est convaincu de la sauvegarde des intérêts de la France ?

Mais nul ne se soucie de vraiment se pencher sur les raisons de cette série de putschs et la double faillite qui en est à l’origine dans tous les cas de figure, celle de la présence française en Afrique de l’Ouest à laquelle n’échappent pas des pays comme la Sénégal et la Cote d’Ivoire, tous les deux sur un volcan menaçant ;  et celle de l’échec économique et social, de sclérose politique et de corruption, de simulacre de démocratie et d’autoritarisme réel. 

 

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