Liban : les sympathisants du Hezbollah se positionnent contre la contestation

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Les forces de sécurité au Liban ont rouvert lundi plusieurs routes bloquées par les manifestants, déterminés à poursuivre leur mouvement de contestation malgré des violentes attaques avant l'aube de partisans des partis chiites Hezbollah et Amal.

Dans un pays au bord de l'effondrement économique, le soulèvement populaire inédit qui réclame le départ d'une classe dirigeante jugée corrompue et incompétente entre dans son 40e jour, sans aucune issue en vue au bras de fer.

Depuis son déclenchement le 17 octobre, des heurts sporadiques ont opposé les manifestants aux partisans d'Amal et du Hezbollah, dont les chefs respectifs Nabih Berri et Hassan Nasrallah sont conspués au même titre que l'ensemble de la classe dirigeante.

Lundi soir, des partisans des deux partis se sont de nouveau approchés en moto de la place des Martyrs, épicentre de la contestation à Beyrouth gardée par la police. Brandissant des portraits de Nabih Berri, ils ont lancé des cailloux sur des tentes de manifestants en scandant "chiite, chiite" avant de s'éloigner, a constaté un correspondant de l'AFP.

Cet incident est survenu après des accrochages nocturnes inédits de par leur ampleur depuis le début du mouvement.

Avant l'aube et scandant des slogans à la gloire de Hassan Nasrallah et de Nabih Berri, président du Parlement depuis 1992, leurs partisans ont caillassé des manifestants bloquant un pont surplombant le centre-ville de Beyrouth. Ils ont ensuite pris d'assaut la place des Martyrs proche et détruit des tentes.

L'armée et la police sont intervenues en tirant des gaz lacrymogènes. Dix personnes ont été blessées selon la défense civile.

Après les attaques nocturnes, le Conseil de sécurité de l'ONU a appelé à "éviter la violence" et à "respecter le droit à protester en se rassemblant pacifiquement".

 "Contrôlez vos partisans" 

"J'exhorte toutes les forces politiques libanaises à contrôler leurs partisans" a lancé sur Twitter le coordinateur spécial de l'ONU pour le Liban, Jan Kubis.

"Ils veulent nous faire peur pour nous empêcher de continuer", lâche en allusion aux assaillants Danny Ayyache, qui a bloqué avec d'autres manifestants une entrée d'un quartier de Beyrouth avant d'être dispersés. "Cela ne fait que renforcer notre détermination".

Les forces de sécurité ont été critiquées par les contestataires pour leur manque de réactivité.

"Pourquoi personne n'arrête ces agressions", déplore Sélim Mourad, enseignant de 31 ans, délogé d'une route qu'il bloquait. "Les forces de l'ordre sont capables de les stopper".

Neuf personnes ont été interpellées au nord de Beyrouth pour des routes bloquées avant d'être libérées en soirée.

D'autres axes ont été bloqués à Tripoli (nord) et dans la Békaa (est).

En soirée, des centaines de partisans du Hezbollah et d'Amal ont manifesté dans la banlieue sud de Beyrouth, pour dénoncer un accident ayant tué à l'aube un homme et une femme dont la voiture a percuté une barrière sur la route installée, selon les deux formations chiites, par des manifestants antigouvernementaux.

Les manifestants ont nié, publiant sur les réseaux sociaux une carte montrant les positions de leurs barrages routiers.

 "Meilleure gouvernance" 

La contestation a poussé à la démission du gouvernement de Saad Hariri le 29 octobre et les tractations pour former un nouveau tardent à débuter, dans un pays en plein marasme économique et où la Banque mondiale prévoit déjà une croissance négative de 0,2% pour 2019.

Les manifestants réclament une équipe de technocrates et d'indépendants.

La mobilisation est en général faible en semaine à comparer avec le week-end, avec un semblant de normalité apporté par la reprise du travail dans le secteur privé et une réouverture des banques et des écoles, fermées pendant plusieurs semaines.

Lundi, le directeur général des affaires politiques au Foreign office, Richard Moore, a lors d'entretiens avec les dirigeants libanais affirmé : "le peuple a été clair avec son appel à une meilleure gouvernance, il devrait être entendu".

La contestation a été déclenchée par l'annonce d'une taxe sur les appels via la messagerie WhatsApp. Même s'il a été aussitôt annulé, cet impôt de trop a fait exploser la colère dans un pays où les services publics élémentaires -comme l'eau courante, l'électricité et l'accès universel aux soins- ne sont pas assurés 30 ans après la fin de la guerre civile.