Cinéma, mon amour de Driss Chouika: FAOUZI BENSAIDI, L’UN DES ARTISANS ORIGINAUX DU CINÉMA MAROCAIN CONTEMPORAIN

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L’approche cinématographique originale et bien contemporaine de Bensaidi se confirme avec son second long métrage, “WWW: What a Wonderful World“, une satire qui a élargi sa renommée internationale

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« Une seule scène peut exprimer la capacité du septième art à renverser les normes et à changer le monde, tout comme l'amour ». Faouzi Bensaidi.

Faouzi Bensaidi, né en 1967 à Meknès, est le cinéaste marocain dont la carrière a laissé une empreinte indélébile sur le paysage cinématographique marocain et au-delà. Avec son regard unique, ses récits originaux et son engagement envers l'exploration de réalités sociales et humaines universelles, Bensaidi s'est imposé comme l'un des réalisateurs les plus influents et novateurs du cinéma marocain contemporain. Il a entamé son parcours artistique en étudiant à l'Institut Supérieur d'Art Dramatique et d'Animation Culturelle de Rabat. Puis sa passion pour le cinéma l'a ensuite conduit en France, à l'École Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre (ENSATT) de Lyon, où il a acquis des compétences techniques et artistiques cruciales pour sa future carrière.

Les débuts de Bensaidi dans le monde du cinéma remontent aux années 1990, où il a travaillé sur plusieurs courts métrages, se forgeant ainsi une expérience précieuse avant de se lancer dans la réalisation de longs métrages. Son premier court métrage, “La falaise“, avait déjà auguré en 1999 d’un bel avenir pour son auteur en remportant plus de vingt prix dans des festivals à travers le monde, avant que son premier long métrage, “Mille mois“, ne confirme son talent en 2003. Ce premier long métrage avait même ouvert la voie à une notable percée internationale. Cette œuvre cinématographique a été sélectionnée pour la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes, marquant ainsi l'entrée de Bensaidi sur la scène internationale. Ensuite, le film a remporté le Tanit d'or au Festival de Carthage, consolidant la réputation de Bensaidi en tant que réalisateur de talent. Ce film offre un regard percutant sur la vie d'un garçon qui s'installe avec sa mère chez son grand-père suite à l’emprisonnement de son père. Bensaidi y allie magistralement réalisme social et éléments oniriques, créant une œuvre visuellement poétique qui transcende les frontières culturelles. Les thèmes universels explorés dans le film ont contribué à son succès critique et ont ouvert la voie à une carrière bien honorable pour ce cinéaste marocain.

UNE APPROCHE CINÉMATOGRAPHIQUE ORIGINALE

L’approche cinématographique originale et bien contemporaine de Bensaidi se confirme avec son second long métrage, “WWW: What a Wonderful World“, une satire qui a élargi sa renommée internationale. Sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes 2006, le film est salué pour sa vision intelligente et contemporaine, inventant une approche originale pour explorer les conséquences des médias et de la technologie sur la société marocaine, en faisant ainsi une œuvre qui résonne au-delà des frontières nationales.

Ce qui distingue le travail de Bensaidi, c'est son approche distinctive du cinéma. Il excelle à fusionner réalisme et rêverie, créant des films qui oscillent entre la réalité crue et des mondes imaginaires. Cette dualité se retrouve dans sa manière de traiter des questions sociales et politiques tout en offrant une réflexion profonde sur la condition humaine. Il ne se contente pas de raconter des histoires, il les sculpte avec une esthétique visuelle soignée et une attention particulière accordée aux détails. Ses films sont empreints d'une atmosphère poétique, capturant la beauté de l'ordinaire et la complexité des relations humaines.

ENGAGEMENT DANS UN CINÉMA DE RÉFLEXION

Au-delà de son talent artistique, Bensaidi est également reconnu pour son engagement dans un cinéma qui donne à voir et réfléchir sur des réalités sociales importantes. Ses films abordent des sujets tels que la religion, la politique et la technologie, offrant une analyse subtile des défis auxquels la société marocaine est confrontée. En cela, Bensaidi s'inscrit dans la tradition des cinéastes engagés qui utilisent le pouvoir du cinéma pour susciter la réflexion et inspirer le changement. Il y croit fermement, affirmant que: « Une seule scène peut exprimer la capacité du septième art à renverser les normes et à changer le monde, tout comme l'amour ». Ses deux derniers films, “Déserts“ et “Jours d’été“, témoignent de sa créativité originale toujours renouvelée. Ce dernier, une libre et créative adaptation d’une pièce d’Anton Tchekhov, alliant le drame et le burlesque d’une manière fort intelligente, présenté au 23ème Festival National du Film, a été curieusement ignoré par le jury de la compétition officielle qui a prouvé ainsi son choix très peu cinéphile !

En plus de son travail créatif et original derrière la caméra, Bensaidi a également exploré la manière de s’exprimer aussi devant la caméra. Il a joué des rôles d’une présence remarquable dans ses propres films et des films d’autres réalisateurs, comme "Loin" d’André Téchiné, "Tresses" de Jilali Ferhati, "Le cheval de vent" de Daoud Aoulad-Syad ou "Mektoub" de Nabil Ayouch. Ces incursions dans des performances en tant que comédien démontrent bien la polyvalence de Bensaidi en tant qu'artiste créateur. 

En fin de compte, Faouzi Bensaidi a laissé une empreinte indélébile sur le cinéma marocain contemporain. Il est parmi les cinéastes créatifs et visionnaires. Son héritage réside non seulement dans ses réalisations individuelles, mais aussi dans la manière dont il a contribué à ouvrir la voie à de nouvelles générations de cinéastes marocains. En inspirant d'autres artistes à explorer des récits audacieux et à défier les conventions, Bensaidi contribue à l'évolution continue du cinéma au Maroc.

FILMOGRAPHIE DE FAOUZI BENSAIDI

CM : « La falaise » (1999) ; « Le mur » (2000) ; « Trajets » (2001).

LM : « Mille mois » (2003) ; « WWW.What A Wonderful World » (2006) ; « Mort à vendre » (2011) ; « Volubilis » (2017) ; « Jours d’été » (2022) ; « Déserts » (2023).

DRISS CH'OUIKA