Marocains du Monde : Il ne s’agit pas de faire ce que l’on a fait sans le faire - Par Naïm Kamal

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Ahmed Réda Chami, président du Conseil économique, social et environnemental

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Par Naïm Kamal

‘’Nous devons nous poser en permanence les questions suivantes : qu’avons-nous fait pour renforcer le sentiment patriotique de nos immigrés ? Le cadre législatif en place et les politiques publiques tiennent-ils compte de leurs spécificités ? Les procédures administratives sont-elles adaptées à leurs attentes du moment ? Leur avons-nous assuré l’encadrement religieux et éducatif nécessaire ?’’ 

Ces interrogations du Roi Mohammed VI dans son discours du 20 aout 2022 ont résonné come une sentence condamnant l’échec des différents intervenants dans l’espace des Marocains du Monde, MDM comme aime à les ‘’acronymer’’ le Conseil économique, social et environnemental (CESE). On compte dans ces intervenants, ‘’ un millefeuille institutionnel devenu indigeste’’, selon l’expression d’un observateur averti, le ministère en charge des Marocains Résidant à l’Etranger (MRE), la Fondation Hassan II pour ces mêmes Marocains et le Conseil Consultatif des Marocains à l’Etranger (CCME).

Fébrilité et agitation

Depuis le discours royal, une fébrilité et une agitation particulières se sont emparées du leadership de cette dernière instance anormalement bicéphale, chacune des deux têtes marquant son territoire en perspective d’une refonte en gestation.

 Aujourd’hui, c’est au tour du CESE de Ahmed Réda Chami d’y mettre son grain.

Le CCME a été une puissante machine à ses débuts (2007) de maintien et d’entretien du lien avec, au choix, les MRE ou les MDM. Mais au bout de quelques années, pour plusieurs raisons, son action s’est essoufflée pour ne plus être que l’ombre d’elle-même transformant le Conseil en un véritable capharnaüm.  

La Fondation Hassan II a été créée en 1990 avec pour « objet d’œuvrer pour le maintien des liens fondamentaux que les Marocains résidant à l’étranger entretiennent avec leur patrie et de les aider à surmonter les difficultés qu’ils rencontrent du fait de leur émigration ». Son action se manifestera surtout à travers le maintien du lien avec la langue du pays et l’enseignement religieux, deux vecteurs tombés en désuétude sous l’effet conjugué de la démographie et des évolutions générationnelles et socioculturelles de l’émigration et de ses espaces de déploiement.

Le ministère a vu, lui, défiler à sa tête, rien que pour ces deux dernières décennies, pas moins de six ministres, de toutes les teintes politiques, chacun, comme on l’a vu dans d’autres départements à l’instar de l’Education nationale, au lieu de capitaliser sur le patrimoine de ses prédécesseurs, effaçant ce qui a été fait pour réinventer le fil à couper le beurre.

L’urgence de remettre de l’ordre dans tout cela s’est faite pressante depuis le discours royal, et le président du Conseil économique, social et environnemental, Ahmed Réda Chami, vient de plaider pour une gouvernance rénovée des politiques publiques et des dispositifs dédiés aux Marocains du Monde (MDM).

Les vraies questions

Que préconise-t-il ? "Au vu de la faible coordination et convergence entre les institutions chargées des MDM", le CESE suggère d'attribuer à un ministre délégué auprès du ministère des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l'étranger, chargé des affaires des MDM, la mission et la responsabilité de concevoir et de veiller à la bonne mise en œuvre de la stratégie MDM. Très bien. Il recommande en même temps d’ériger la Fondation Hassan II pour les Marocains résidant à l'étranger en établissement public stratégique qui constituera l’opérateur et le bras opérationnel pour le déploiement de la stratégie MDM. Parfait ! En concertation, ajoute-t-il, avec les autres acteurs et parties prenantes, ainsi que de créer au sein des ambassades du Royaume des antennes de l’établissement public stratégique chargées du déploiement de la stratégie MDM au niveau des pays d’accueil. Excellent !

Sauf qu’il s’agit, en bref, de refaire exactement ce que l’on a fait sans le faire, tout en introduisant une certaine hiérarchisation, supposée subtile, qui déclasserait le CCME au profit de la Fondation Hassan II et réduirait le ministère à une fonction de coordination. Soit !

Seulement tout cela exhale une odeur de coulisses pas très saine, inspirée d’ambitions qui ne veulent pas rendre le tablier. Or les vraies questions qui nécessitent des réponses précises et argumentées sont : Pourquoi persister dans la multiplication des intervenants dont on connait les résultats ? Ne serait-il pas plus judicieux de réfléchir les Marocains du Monde en tant qu’entité, certes hétérogène, mais dont les soubassements et les missions auxquelles on veut les dédier sont parfaitement homogènes ? Pourquoi ne pas instituer un outil technique, unique, pour non seulement gérer, traiter et solutionner la problématique dans son ensemble telle que décrite par le rapport du CESE, mais aussi pour optimiser et créer la synergie des moyens et des énergies nécessaires à ce déploiement ? Et éviter l’éparpillement des décisions et la dilution des responsabilités

 

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