Mondial-2022: l'Amérique latine plus folle que jamais des vignettes Panini

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Une personne échange des autocollants Panini pour la Coupe du monde de football à Santiago, le 24 septembre 2022. Comme tous les quatre ans, l'album Panini de la Coupe du monde, qui se déroulera cette fois au Qatar du 20 novembre au 18 décembre, prend la température d'une région qui se dépense sans compter pour le football, et qui s'enthousiasme à l'idée que Lionel Messi ou Neymar puissent briser l'hégémonie européenne. (Photo de Martin BERNETTI / AFP)

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Certains y consacrent des sommes rondelettes, d'autres font la queue dès l'aube ou passent des journées dans les points d'échange... La passion pour le football et le Mondial-2022 transpire en Amérique latine jusque dans les indémodables vignettes Panini.

"Presque tout ce que je gagne, qu'on me prête, ou qu'on me doit, je l'investis dans l'achat de figurines. C'est mon hobby, ma bouée de sauvetage", assure à l'AFP l'Argentine Hilda Losada.

Cette grand-mère de 68 ans, qui cherche à compléter son album de près de 700 vignettes et celui de son petit-fils, attend depuis cinq heures du matin l'ouverture d'un magasin à Buenos Aires.

Cela fait des jours qu'une pénurie a frappé l'Argentine, poussant même le gouvernement à demander des comptes à la firme d'origine italienne et à jouer les médiateurs avec des commerçants mécontents pour certains de ne pas avoir le monopole de ce juteux commerce.

"C'est l'un des rares endroits où tu peux en trouver en ce moment", explique Hilda Losada au milieu d'une longue file de collectionneurs. Tous ne seront pas servis et certains avouent être prêts à payer sur le marché noir le double du prix officiel d'environ 1 dollar pour cinq vignettes.

Sa famille lui dit qu'elle est folle, mais Hilda Losada ignore les critiques et se laisse aller à sa fascination pour cette collection quadriennale depuis qu'elle est "petite fille", même si elle reconnaît souffrir, comme des millions d'Argentins, de l'inflation galopante (56%).

"Il est vrai qu'on traverse une crise économique, mais l'Argentine est presque toujours en crise économique. Et là, avec ces vignettes (...), l'argent apparaît de nulle part", s'étonne la propriétaire du magasin, Leila Edul.

Pourtant, le prix du paquet a augmenté depuis la Coupe du monde 2018 en Russie. Au Brésil, il a même doublé, passant de 0,37 à 0,74 dollar.

- "On aime échanger" -

"Mon père m'a acheté trois paquets" et "quand j'ai vu +Argentine 19+ j'ai réalisé que c'était Messi! J'étais trop heureux. Je l'ai montré à tout le monde et puis je l'ai collée, là, dans l'album", raconte, les yeux émerveillés, Tiziano Orselli, 14 ans, venu avec son père faire des échanges au parc Rivadavia de Buenos Aires.

Mauricio Valencia, qui a installé sur une table avec tréteaux des tas de vignettes à échanger ou à vendre, dit avoir déjà fait ce business en Colombie car "en Amérique latine on aime échanger les vignettes" Panini. Mais "ce n'est pas pareil ici" en Argentine, "il y tellement de ferveur, tous les week-ends c'est plein".

Raul Vallecillo, responsable Panini au Chili, affirme que les ventes en Amérique latine ont dépassé les attentes de l'entreprise fondée à Modène (Italie), qui a sorti son premier album pour la Coupe du monde 1970 à Mexico.

La sélection chilienne n'est pas qualifiée pour le Qatar et pourtant en un mois a été vendu le stock prévu pour quatre, dit-il, assurant que la tendance est la même au Venezuela, en Colombie et au Pérou, pas plus qualifiés.

Selon M. Vallecillo, l'engouement est exacerbé par la probable dernière participation des deux stars de ces 15 dernières années, Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, avec l'espoir vivace que l'Argentine ou le Brésil parviennent enfin à briser l'hégémonie européenne depuis 20 ans.

- Vendeurs de rue -

A Sao Paulo, le Musée du football est le lieu de rencontre des collectionneurs. Leandro Fonseca, 40 ans, est à la recherche des tirages spéciaux sortis pour cette édition, dont certains à l'effigie de Neymar se vendent sur internet près de trois fois le salaire minimum brésilien (560 dollars).

"J'ai du retard sur les +extras+, mais j'espère remplir une vingtaine d'albums. A chaque Coupe du monde, j'en remplis plusieurs", dit-il, affirmant avoir dépensé jusqu'à présent environ 1.800 dollars pour en terminer huit.

Partout en Amérique latine, des revendeurs profitent de l'aubaine.

Sur une artère centrale de Montevideo, des enfants avec une liste de numéros inscrits sur une feuille viennent acheter leurs figurines manquantes.

Les joueurs stars, comme Messi, Neymar et localement Luis Suarez, se négocient 100 pesos (2,50 euros). Les autres joueurs des équipes d'Uruguay, Argentine et Brésil valent entre 20 et 50 pesos (0,50 et 1,25 euro), contre seulement 10 (0,25 euro) pour les autres, sauf pour la star française Kylian Mbappé (50 pesos).

Guillermo Orcile aide son fils Salvador de 7 ans à finir son album seulement en pratiquant l'échange. "C'est important qu'il comprenne l'échange, ce qui rend les albums si importants. Parce que si c'est juste pour acheter, l'esprit est perdu".

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