Une lésion cérébrale emporte un boxeur américain et relance la polémique

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Un nouveau mort qui laisse la boxe groggy: l'Américain Patrick Day, emporté à 27 ans par une lésion cérébrale des suites d'un KO, remet en lumière la difficulté de protéger les boxeurs dans un sport indissociable des coups portés à la tête.

Patrick Day, tombé le 12 octobre au tapis au 10e round d'un combat à Chicago contre son compatriote Charles Conwell, est mort mercredi des suites de sa lésion cérébrale après quatre jours dans le coma.

Il avait été évacué inconscient sur une civière et transporté à l'hôpital Norhtwestern Memorial de la ville, où il a ensuite subi en urgence une opération de chirurgie cérébrale. Il est mort entouré de ses proches et de son entraîneur. 

Il est au moins le troisième boxeur professionnel cette année à avoir succombé à ses blessures après un combat, après l'Argentin Hugo Santillan et le Russe Maxim Dadashev.

De quoi relancer la controverse sur les lésions cérébrales dans ce sport dont les coups à la tête sont un composant essentiel.

"C'est inévitable que cela puisse arriver", reconnaît le docteur Maryannick Machard, présidente de la commission médicale de la Fédération française de boxe. "Quand vous prenez des coups à la tête régulièrement, ce n'est pas anormal qu'il y ait des pépins".

D'où la présence obligatoire, en France, d'un médecin près des rings. Au haut niveau, les boxeurs sont régulièrement soumis à des IRM (Image à résonnance magnétique), permettant de détecter d'éventuelles lésions au cerveau.

Dans le communiqué annonçant la mort de Day, le promoteur de combats américain Lou DiBella a appelé indirectement les autorités à adopter des normes de sécurité plus strictes.

"Il est très difficile d'expliquer ou de justifier les dangers de la boxe dans un moment pareil (...) Cependant, l'heure est venue de passer à l'action. Bien que nous n'ayons pas les réponses, nous savons les nombreuses questions à poser et nous avons les moyens d'y répondre de manière responsable, pour rendre la boxe plus sûre pour tous les participants", a-t-il écrit, sans plus de précisions.

Fatals "seconds impacts" 

 

En boxe, le principal danger vient du "syndrome du second impact", mortel dans un cas sur deux et provoqué par un nouveau coup à la tête, parfois très léger, après avoir subi une première commotion dans les minutes voire les jours précédents, explique le neurologue français Jean-François Chermann.

"Il est indispensable que l'on suive mieux les boxeurs professionnels qu'actuellement", affirme-t-il, réclamant davantage de fonds alloués et de tests, en présaison, et dans les jours précédant et suivant les combats.

Les symptômes sont difficiles à détecter car ils peuvent s'évaporer au bout de quelques minutes, ou au contraire survenir des jours après le choc. Les commotions favorisent aussi l'apparition de dégénérescences des années plus tard.

Elles ont déjà suscité des scandales dans plusieurs sports de contact, dont le rugby en Europe en 2018 et plus encore dans le football américain, sport-roi aux Etats-Unis dont les instances ont été accusées pendant des années d'avoir fermé les yeux sur les dangers encourus par les joueurs.

Autre difficulté: les boxeurs qui fraudent pour passer entre les gouttes. Le cas de Boris Velichkov, un Bulgare amateur mort en septembre après un combat professionnel, auquel il avait pu participer en présentant les papiers de son cousin.

Ou de Jeffrey Claro, un Philippin mort en 2017 d'un second impact après un KO à l'entraînement, suspecté comme 150 de ses pairs d'avoir fourni de faux scanners cérébraux pour continuer à boxer.

D'autres changent de discipline pour échapper aux contrôles. "Quand je mettais un boxeur à pied 30 jours (en boxe anglaise), il continuait à faire de la boxe thaï et à prendre des coups dans la tête", se désole Maryannick Machard.

Pour y remédier, la France travaille à unifier les règlementations de ses fédérations, par exemple sur les temps de repos ou la définition du KO, y compris avec le MMA (Mixed Martial Arts), sport de combat extrême autorisant les coups de coude et de genou. Il fait fureur aux Etats-Unis et doit être légalisé avant la fin de l'année en France.

Les boxeurs devraient par ailleurs disposer, à partir de 2020, d'un "passeport numérique" contenant leurs antécédents médicaux. Sa consultation sera obligatoire avant les combats.

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