Un service militaire féminisé

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Par Imane Benichou - Les Marocaines n’échapperont pas au service militaire. La Chambre des représentants a adopté mercredi le projet de loi relatif au service militaire, en rejetant l'amendement selon lequel le service militaire serait facultatif pour les femmes. Un service militaire féminisé ! Cela ne semble pourtant pas satisfaire les Marocaines, qui accueillent à bras ouvert leur obligation nationale à défendre la patrie, et déplorent un pied d’égalité sur tous les niveaux, économique, social, politique, etc.

Le projet de loi 44.18 relatif au service militaire a été approuvé à l’unanimité, mercredi lors d'une séance plénière, par la commission de la justice, de la législation et des droits de l’homme à la chambre des représentants.

Lors d’une réunion à huis-clos, le gouvernement a rejeté plusieurs amendements qui ont été proposés, notamment l'amendement selon lequel le service militaire serait facultatif pour les femmes. Argument : l’égalité entre les deux sexes.

Présentant ce projet, le ministre délégué chargé de l'Administration de la défense nationale, a avancé l’argument de l’égalité entre les deux sexes, inscrit dans la constitution du Royaume. Abdellatif Loudyi a, à cet égard, rappelé le discours du Roi Mohammed VI lors de l’ouverture de la session d’automne du parlement, dans lequel il avait insisté sur le principe d’égalité entre les deux sexes et la non discrimination entre les différentes couches sociales pour le service militaire.

Parlons devoirs… et droits

Les dispositions de l’article 38 de la constitution marocaine stipulent que tous les citoyens contribuent à la défense de la patrie et de son intégrité territoriale contre toute agression ou menace.

Les contenus de ce projet de loi ont été élaborés conformément aux principes constitutionnels et ce, dans le cadre d'une corrélation entre droits et devoirs de citoyenneté, tout en se basant sur les meilleures pratiques internationales et législations nationales en la matière, a indiqué M. Loudyi.

Ainsi, les Marocaines et les Marocains doivent avoir les mêmes devoirs et les mêmes droits.

Toutefois, au lendemain de l’adoption de ce projet, certains citoyens ont appelé, notamment sur les réseaux sociaux, à l’adoption de lois pour une égalité entre les sexes en matière de citoyenneté. Ils ont, en outre, témoigné d’une crise de confiance dans l’action publique, concernant les lois qui existent déjà, tout en soulignant que le pays a du mal à faire appliquer ses lois.

En effet, plusieurs violations et non respect de lois sont observés par des rapports d’ONG et du CNDH, notamment des licenciements abusifs de femmes enceintes, et des femmes qui arrivent encore moins que les hommes à avoir accès à la justice.

Selon «The Global Gender Gap Report», un rapport mondial sur la parité hommes-femmes dans 149 pays dont le Maroc, établi par le Forum économique mondiale de la Banque mondiale et publié mardi 18 décembre 2018, le Maroc reste loin de la moyenne mondiale. Classé 137e, il perd une place par rapport à son classement de 2017.

Le Royaume est au 141e rang mondial pour la participation économique et opportunité, à la 117e place au niveau de l’éducation, au 102e rang pour ce qui est de l’autonomisation politique et à la 135e place au niveau de l’indicateur Santé et survie.

Un rapport du CNDH, publié 10 ans après la réforme du Code de la famille, 3 ans après la promulgation de la constitution de 2011 et 20 après l’adoption de la plateforme de Beijing, relate les différentes formes de discriminations faites aux femmes notamment dans les domaines juridiques, social, politique, économique et culturel, et jette la lumière sur les politiques publiques et ses répercussions négatives sur les femmes les plus exposées aux violations de leurs droits.

Selon le rapport, les femmes et filles sont les plus exposées à la violation de leurs droits dont les femmes âgées pauvres, les femmes en situation de handicap, les femmes célibataires, les femmes domestiques, les détenues, etc. C’est dire qu’il ne fait pas bon être femme au Maroc.

Notons que le projet de loi 44.18 fixe l’âge d’appel des assujettis à 19 ans, alors que le service militaire est dû jusqu’à l’âge de 25 ans. Toutefois, les personnes âgées de plus de 25 ans et qui ont bénéficié de l’une des exemptions prévues par la loi peuvent toujours être appelées au service si la raison de leur exemption n’est plus d’actualité, et ce jusqu’à l’âge de 40 ans. En vertu de l'article 4 de ce projet, la durée du service militaire est de 12 mois.

Abdellatif Loudyi a souligné que le service militaire a pour objectif de renforcer la cohésion sociale, d'ouvrir aux appelés la voie de l’intégration dans la vie professionnelle et sociale en leur permettant de bénéficier d'une formation militaire et leur inculquer la culture militaire fondée sur la discipline, le courage, l'engagement, la responsabilité, le respect des institutions, et la gestion du temps.

Il a fait savoir qu'une campagne d'information et de communication sera lancée pour expliquer les objectifs de ce projet.

Pour rappel, ce projet de loi a été adopté, en août 2018, en Conseil des ministres, présidé par le Roi Mohammed VI. Le texte de loi sera soumis la semaine prochaine à la Chambre des conseillers pour un vote rapide.

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