La fin d’une illusion

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Aujourd’hui ce n’est pas la réaction du PJD qu’il faut craindre, mais la perception qu’auront les Marocains de la situation

Benkirane n’a plus qu’un choix : remettre les clés. En face on veut lui imposer d’être minoritaire dans sa majorité. Il a fait énormément d’erreurs dans ces négociations, ce n’est pas un homme d’Etat, il a une faible perception des rapports de force, mais il est à la tête d’un parti structuré, qui ne le laissera pas le trainer dans la boue, seule issue que lui proposent ses adversaires.

Les débiles mentaux qui nous servent d’experts vont nous expliquer dès demain que « c’est bien fait pour lui ». L’enjeu est loin d’être politicien, il est ailleurs.

Depuis la chute du mur de Berlin, on a cru, idiots que nous sommes, à la possibilité d’une démocratisation par étapes, à doses homéopathiques. Le premier grand recul c’est 2002. J’avais écrit à l’époque « la fin de la politique ».Le nouveau règne, le printemps arabe, la constitution de 2011, confortaient l’idée, noble, d’une construction sans ruptures.

Actuellement, ce n’est plus la personne de Benkirane, que j’affronte depuis 40ans, qui est en question. Mais la grande question, que lui-même n’a jamais soulevée, des rapports entre les différents pouvoirs et la place qu’ y occupe la souveraineté populaire.

Je rappelle que c’est Feu Hassan II, donc le palais, qui a permis à l’Islam politique, en passant par une coquille vide dirigée par Abdelkrim El Khattib, qui les a mis dans le jeu. En démocratie, peut on dire aux gens, vous avez le droit de jouer mais pas de gagner ?

Aujourd’hui ce n’est pas la réaction du PJD qu’il faut craindre, mais la perception qu’auront les Marocains de la situation. Le jeu politique actuel ne reviendrait-il pas à leur dire que les élections ne servent à rien, que tous les partis, à part le PJD, obéissent aux ordres, que «tout peut fonctionner sans gouvernement »et que quand ils votent mal cela sera redressé ? Il e faut pas oublier que l’exception marocaine, c’est juste que nous passions d’un régime autoritaire à un régime où les libertés fondamentales sont respectées. Pour l’égalité des pouvoirs, on n’est pas encore prêts.

Or justement le seul moyen pour que l’on ne se retrouve pas dans quinze ans à regretter un nouvel attentat contre la démocratie, c’est de se poser les vraies questions et d’avoir le courage de ses positions. Aucun marocain ne plaide pour une rupture violente, mais la trajectoire actuelle sème le doute dans les esprits. C’est donc maintenant aux démocrates d’agir, car, comme l’a dit le Roi Mohammed VI, « Il n’y a pas de démocratie sans démocrates».

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