Troisième chance pour l'accord de Brexit de Theresa May

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Ce devait être le jour du Brexit, ce sera au mieux le jour de la sortie de l'impasse: les députés britanniques sont appelés à voter vendredi sur l'accord de divorce avec l'Union européenne, dont l'adoption ouvrirait la voie à un Brexit le 22 mai.

Le texte, conclu entre Londres et Bruxelles en novembre à l'issue de 17 mois de négociations fastidieuses, a déjà été massivement rejeté à la Chambre des communes à deux reprises, en janvier puis en mars. Le vote, prévu à 14h30 GMT, portera uniquement sur le Traité de retrait, et pas sur la Déclaration politique qui l'accompagne.

Pour amener les rebelles de sa majorité conservatrice à changer d'avis, la Première ministre Theresa May a promis mercredi de céder sa place en cas de résultat favorable.

Ce geste dramatique a convaincu certains "Brexiters" à rentrer dans le rang. Son rival et ancien ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson, a annoncé son intention de soutenir le texte, de crainte qu'un nouveau rejet aboutisse finalement à l'annulation du Brexit, tout comme Jacob Rees-Mogg, l'influent chef de file du European Research Group, qui compte 60 à 85 députés.

Pour autant, la partie est loin d'être gagnée pour la dirigeante, qui avait obtenu la semaine dernière des dirigeants de l'UE un court report du Brexit au-delà de la date prévue du 29 mars face au blocage au parlement et afin d'éviter une sortie sans accord, cauchemar des milieux économiques.

Son allié au parlement, le petit parti nord-irlandais DUP, sans lequel elle n'a pas de majorité absolue, a encore répété jeudi soir son opposition à l'accord.

"Nous ne pouvons être d'accord avec un texte qui pose un risque stratégique à l'union" de l'Irlande du Nord et de la Grande-Bretagne, a déclaré sa cheffe Arlene Foster dans une vidéo publiée sur Twitter.

En cause, les dispositions relatives au "backstop", ou filet de sécurité, qui prévoient, en l'absence d'autre solution, le maintien du Royaume-Uni dans une union douanière avec l'UE et un alignement plus poussé de Belfast sur les normes européennes, afin d'éviter le retour d'une frontière physique sur l'île d'Irlande.

A quelques heures du vote décisif pour l'avenir du pays, les membres du gouvernement continuaient leur travail de persuasion. "C'est notre dernière chance de voter pour le Brexit tel que nous le concevons", a déclaré le ministre du Commerce international, Liam Fox, sur la BBC.

Dans la rue, des Britanniques en faveur du Brexit ont décidé de montrer leur colère de voir retardée la sortie de l'UE pour laquelle ils avaient voté en juin 2016. "L'establishment avait promis que nous quitterions l'UE le 29 mars 2019 mais ils essaient maintenant de retarder le Brexit ou même de l'arrêter", ont dénoncé les animateurs du mouvement europhobe Leave Means Leave, qui rassemblera ses troupes devant le Parlement à partir de 16H00 GMT.

Contrairement aux deux précédents votes sur l'accord de divorce, le gouvernement a décidé de ne présenter qu'une partie de celui-ci, le Traité de retrait -- qui règle les questions de la frontière irlandaise, des droits des citoyens expatriés et la facture à régler par Londres -- et d'en exclure la Déclaration politique sur la future relation avec l'UE.

Cette astuce lui permet de contourner la règle soulevée par le président de la Chambre des communes, John Bercow, qui interdit de présenter une nouvelle fois au cours de la même session parlementaire un texte déjà rejeté. Ainsi amputée, "la motion est nouvelle, substantiellement différente, et en conformité avec les conditions posées", a estimé le "speaker".

Mais l'opposition a condamné la manoeuvre. "C'est une tentative désespéré de couper l'accord en deux, et de présenter la moitié au Parlement", a dénoncé Keir Starmer, le porte-parole du Parti travailliste pour le Brexit. "Retirez la Déclaration politique, et vous avez un Brexit à l'aveugle, vous n'avez aucune idée de ce pour quoi vous votez".

La loi britannique impose que la Déclaration politique soit également adoptée à la Chambre des communes pour que l'accord de Brexit soit valable.

Si le Traité de retrait est accepté le Royaume-Uni quittera l'UE le 22 mai, selon le délai accordé par Bruxelles. S'il est rejeté, Londres aura jusqu'au 12 avril pour présenter une alternative et demander un nouveau report s'il veut éviter une sortie brutale.

Mais dans ce cas, le Royaume-Uni devra sans doute prendre part aux élections européennes fin mai, une éventualité que Theresa May souhaite absolument éviter.

Les députés, eux, ont tenu cette semaine une série de "votes indicatifs" pour tenter d'élaborer une alternative à l'accord de Theresa May. Ils doivent reprendre leurs travaux lundi pour trouver une majorité sur une des huit options qu'ils ont proposées.

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