Soudan, des graffitis à la mémoire des martyrs de la contestation

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"Cette peinture le maintient en vie": la voix de Ma?ssa Omar s'?trangle lorsqu'elle ?voque son fils Walid, un manifestant tu? en juin ? Khartoum d?sormais immortalis? par un portrait r?alis? sur le mur de la maison familiale.

Le portrait est l'oeuvre d'Assil Diab. Cette artiste soudanaise a lanc? une campagne de peintures murales et graffitis en m?moire des manifestants tu?s dans la r?pression de la contestation au Soudan.

Walid Abdelrahim a ?t? tu? lors d'un mouvement de d?sob?issance civile observ? pendant trois jours en r?action ? la brutale dispersion le 3 juin d'un sit-in ayant tu? des dizaines de manifestants et bless? des centaines d'autres.

"Quand je vois cette peinture, ?a me donne de la force. Je suis fi?re d'?tre la m?re d'un martyr", assure ? l'AFP Mme Omar, en regardant le visage de son fils peint sur le mur de leur maison ? Bahari, quartier du nord de Khartoum.?

Selon des m?decins proches du mouvement de contestation, 246 personnes ont ?t? tu?es ? travers le pays depuis le d?but des manifestations d?clench?es en d?cembre par le triplement du prix du pain en plein marasme ?conomique.

Marqu?es par la destitution le 11 avril du pr?sident Omar el-B?chir et une r?pression brutale, les manifestations se sont poursuivies, la contestation exigeant aux militaires le transfert du pouvoir ? un gouvernement civil.

Immortaliser leur h?ritage

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"Nos martyrs ne sont pas morts, ils vivent parmi les r?volutionnaires": c'est ce slogan des contestataires qui a motiv? et inspir? Mme Diab, ancienne employ?e de la cha?ne d'information qatarie Al-Jazeera, et son ?quipe. ?

"L'id?e est d'immortaliser leur h?ritage dans leur propre maison et de rendre les habitants de leur quartier fiers d'un martyr qui a sacrifi? sa vie pour le Soudan", explique ? l'AFP Mme Diab, 29 ans, par t?l?phone depuis Doha.

"Les graffitis refont vivre les martyrs et perp?tuent leur souvenir aupr?s des gens, qu'ils aient ou non soutenu la r?volution", ajoute-t-elle.?

Chaque graffiti lui co?te environ 570 euros ? r?aliser, les prix des produits et outils n?cessaires sont ?lev?s.

"Mais les martyrs sont descendus dans les rues et sont morts pour nous. C'est le minimum que l'on puisse faire pour eux", affirme Mme Diab, qui a peint une trentaine de portraits de manifestants tu?s ? Khartoum.

Au Soudan, les graffitis ont ?t? pendant des ann?es un art clandestin, consid?r?s par les services de s?curit? comme un symbole de contre-pouvoir ou comme du vandalisme pur et simple, alors que s'exer?ait une censure vigoureuse.

Mais tout a chang? le 6 avril, lorsque des manifestants se sont rassembl?s par milliers devant le si?ge de l'arm?e ? Khartoum, malgr? les tirs de lacrymog?nes, pour r?clamer la destitution du pr?sident B?chir par les militaires.

D?s le lendemain de ce rassemblement, des artistes ont commenc? ? esquisser des dessins sur les murs de la capitale.

Bahari, haut lieu de la contestation, est devenu la toile favorite des graffeurs.

Un portrait sur le mur bleu d'un club de jeunes y d?peint le visage de Mohamed Mattar. Tu? comme des dizaines d'autres manifestants le 3 juin dans la r?pression du sit-in install? devant le QG de l'arm?e, Mattar est vite devenu une ic?ne de la contestation.

"Cette peinture me donne envie de manifester pour que les demandes de ceux qui sont morts pour nous soient satisfaites", explique Moujahid Sadek, un habitant. "Je ne connaissais pas Mattar, mais nous le connaissons tous maintenant".

Exp?rience dangereuse

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Etudiant en Grande-Bretagne, Mattar ?tait retourn? rendre visite ? sa famille et avait ? peine c?l?br? son 26e anniversaire lorsqu'il d?cida de passer une nuit au sit-in.

Son meurtre a inspir? une campagne de solidarit? sur les r?seaux sociaux avec le hashtag #blueformattar.

"Nous avons d?cid? de peindre son visage ici parce que c'est une vaste zone o? le maximum de personnes peuvent le voir", explique Eythar Gubara, membre de l'?quipe de Mme Diab.

Certaines oeuvres de Mme Diab repr?sentent aussi des manifestants tu?s lors de la r?pression en septembre 2013 de rassemblements anti-aust?rit?.

Parmi ces visages, celui de Babikir Anwar, peint sur un mur de la maison familiale dans le quartier Chambat.

"Nous ne t'oublierons pas Bakour", indique une inscription accompagnant le graffiti, en r?f?rence ? son surnom.

"C'est comme s'il ?tait avec moi, comme s'il ?tait assis devant moi", confie sa m?re, Adawiya Mohamed, v?tue d'une robe noire traditionnelle. "Je suis heureuse que le Soudan se rappelle encore de son h?ritage".

Mais peindre ce graffiti n'a pas ?t? facile pour Mme Diab.?

Avec son ?quipe, ils sont souvent confront?s aux paramilitaires redout?s des Forces de soutien rapide (RSF), accus?s par des groupes de d?fense des droits humains et les manifestants d'avoir perp?tr? la sanglante r?pression du 3 juin.?

"C'?tait une exp?rience dangereuse, mais qui valait la peine de prendre des risques", dit Mme Diab.

"Je voulais immortaliser l'h?ritage de ces martyrs de la meilleure mani?re que je connaisse: ? travers les graffitis."

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