Le vaccin existe depuis 50 ans mais la rougeole a tué 140.000 personnes en 2018

5437685854_d630fceaff_b-

391
Partager :

Après des décennies de progrès spectaculaires, la lutte contre la rougeole stagne et le nombre de morts est reparti à la hausse en 2018, ont alerté l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et les autorités sanitaires américaines jeudi, alors que des flambées ont lieu du Pacifique à l'Europe.

C'est l'un des virus les plus contagieux, qui peut rester dans une pièce deux heures après le passage d'une personne infectée, et il a provoqué des épidémies sur cinq continents depuis 2018, explosant dans les villes ou les quartiers où trop peu de gens sont vaccinés.

Les petites îles Samoa dans le Pacifique Sud luttent en ce moment contre l'épidémie et comptent leurs morts: 62 depuis octobre. Presque tous étaient des enfants de moins de quatre ans. Les autorités ont coupé l'accès à l'archipel et opéraient jeudi une campagne de vaccination porte-à-porte.

Cinq pays ont concentré près de la moitié des cas en 2018: République démocratique du Congo, Liberia, Madagascar, Somalie et Ukraine, selon un rapport publié par les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC).

Mais le virus voyage facilement. Israël a ainsi vu l'importation d'une centaine de cas venus d'ailleurs, des Philippines et d'Ukraine... De là, quelques voyageurs infectés ont transmis la maladie dans les quartiers juifs de New York et contribué à la plus grande épidémie aux Etats-Unis depuis 1992.

Dans les pays riches, la rougeole tue pas ou très peu. Mais en RDC, la rougeole tue deux fois plus qu'Ebola: 5.000 morts cette année.

Au total, 142.000 personnes en sont mortes dans le monde en 2018. C'est quatre fois moins qu'en 2000, mais en hausse de 15% par rapport à 2017.

La plupart des morts sont des enfants.

"Tout le monde sait qu'il y un vaccin contre la rougeole sûr, efficace, disponible partout depuis 50 ans", s'est lamentée Kate O'Brien, directrice de la vaccination à l'OMS, dans une conférence de presse. 

"C'est vraiment un échec collectif de voir ces épidémies".

Sous-vaccination 

Un chiffre illustre cet échec : depuis 2010, la proportion de la population mondiale ayant reçu la première dose du vaccin (sur deux recommandées) stagne à environ 86%. Pour empêcher les épidémies, l'objectif est 95%.

"On n'a fait aucun progrès pour la couverture vaccinale contre la rougeole depuis une décennie", résume Kate O'Brien.

Mais les moyennes sont trompeuses. Seuls 61% des pays ont atteint la barre de 90% pour la première dose. Il y en avait plus en 2013.

L'Europe est quasiment à l'objectif en moyenne, ce qui n'a pas empêché des épidémies car il suffit qu'une communauté soit sous-vaccinée pour que le virus s'y implante. L'AFP s'est rendue dans la petite bourgade néerlandaise de Urk, très religieuse, où seuls 60% des habitants sont vaccinés et où une épidémie a frappé en juin.

En Afrique les trois quarts de la population sont vaccinés, mais cela cache de fortes disparités régionales. Moins d'un pays africain sur trois a vacciné au moins 90% de sa population. Les infrastructures de santé restent insuffisantes.

Dans les pays développés, le mouvement de défiance à l'égard des vaccins a contribué à la résurgence de la maladie.

Peut-être les gens ont oublié qu'avant l'apparition du vaccin dans les années 1960, la rougeole tuait aussi à New York et à Paris. Les Etats-Unis ont failli perdre cette année le statut, gagné en 2000, de pays où la rougeole a été officiellement éradiquée (absence de transmission continue pendant 12 mois dans une zone géographique particulière).

Mais la Grande-Bretagne, la Grèce, l'Albanie ou la République tchèque ont perdu ce statut en août. L'année 2019 a vu un doublement du nombre de cas de rougeole en Europe.

lire aussi