France, une leçon magistrale

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Chez nous, les 32 partis veulent réformer l’éducation nationale. Que proposent-ils ? Rien, absolument rien de concret ! Pire, on nous annonce aujourd’hui la fin de la gratuité de l’école publique, sans aucun débat au préalable

Ceux d’entre nous, qui ont suivi le débat entre Juppé et Fillon, ne peuvent que partager mon amertume. Le débat a été digne, incluant tous les sujets qui intéressent les citoyens, les divergences ont été clarifiées, point par point. Impossible chez nous d’avoir le même exercice, parce qu’il n’y a pas de programmes. Il y a juste des slogans. Pourtant, nous avons relativement les mêmes problèmes. Quand les deux candidats français soulèvent le nombre de parlementaires, de ministres et qu’ils proposent le non-cumul, par exemple, qui propose quelque chose sur le même sujet au Maroc ? Personne. Sur la question de l’école, son rôle, son lien avec le monde du travail, le retour de l’autorité en son sein, la sélection à l’entrée des universités, deux visions se sont affrontées, offrant chacune aux électeurs un chemin pour la réforme. Chez nous encore, les 32 partis veulent réformer l’éducation nationale. Que proposent-ils ? Rien, absolument rien de concret ! Pire, on nous annonce aujourd’hui la fin de la gratuité de l’école publique, sans aucun débat au préalable. La santé publique est bien meilleure en France qu’au Maroc et pourtant, les politiques français sont à son chevet. Chacun des deux candidats a détaillé ses propositions pour lutter contre les déserts médicaux, réduire le déficit de la caisse sociale, améliorer l’accès aux soins, démocratiser l’accès aux soins. Chez nous, à part la réduction des prix des médicaments, il n’y a même pas le début d’une réflexion, alors que nos hôpitaux sont décriés par les usagers, les professionnels et même par leur propre ministre de tutelle, qui s’arrête au seul constat. De manière très courageuse, les deux candidats français ont proposé une réduction drastique du nombre de fonctionnaires pour réduire la dépense publique. Ils ont expliqué comment ils comptaient le faire, sans impacter la qualité du service public. Chez nous, les salaires de la fonction publique représentent 11% des dépenses de l’Etat. Et que proposent donc nos politiques pour rationaliser les ressources humaines ? Rien, par peur électoraliste. Pour améliorer le climat des affaires en France, les deux candidats font des choix libéraux, de droite assumée : baisse des charges, des impôts sur les entreprises et hausse de la TVA. Ils veulent tous les deux combattre le carcan bureaucratique, libérer le marché du travail, faciliter les licenciements, simplifier le code du travail. Chez nous, les majorités changent, pas la fiscalité, ni le code du travail. C’est pourtant sur ces deux sujets que le clivage devrait s’opérer entre gauche et droite. Pas un seul parti marocain n’a parlé du contexte international lors de la campagne. Lors du débat des primaires en France, c’était une question essentielle. Le rôle de la France au sein de l’Europe et dans le monde, les rapports avec les USA et la Russie ont été largement abordés, parce qu’ils ont un impact sur la sécurité du pays, ses échanges commerciaux, mais aussi sa grandeur. Notre classe politique ne propose rien, parce qu’elle n’a aucune vision. Même si la diplomatie est une affaire régalienne, cela n’empêche pas nos partis politiques d’avoir des visions différenciées. Il est temps de poser les vraies questions. Ceux qui sont censés nous représenter, nous traitent-ils en citoyens mineurs incapables de comprendre au-delà de simples slogans, «Lutte contre la corruption», par exemple, sans la moindre mesurette ? Ou au contraire, n’ont-ils aucune expertise sur ces sujets ? Le résultat de cette quasi absence de débat et de manque d’idées, c’est le nombre de Marocains qui ne se rendent plus aux urnes. La désastreuse qualité de l’offre politique y est pour beaucoup.