Algérie : Des esprits ouverts à des frontières ouvertes

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Par Naïm Kamal - Les raisons de la fermeture de frontières algéro-marocaines sont ailleurs et tout le monde les connait. Même si les pouvoirs veulent faire croire à une stratégie qu’eux seuls sont capables d’appréhender

Le Quotidien d’Oran publiait en janvier dans sa  rubrique un texte traitant de la problématique des frontières où évoquant la frontière terrestre algéro-marocaine, il relève que « la passion et l'immobilisme diplomatique autour de ce sujet dépassent l'entendement. » Il conclut que la frontière est le sujet « d'une affirmation de souveraineté et de défiance à l'égard d'un voisin, ou plutôt d'un parent qui est aussi un voisin, avec lequel on a du mal à s'entendre. Avec lequel on n'a pas envie de s'entendre. »

Dans son édition du 5 février, le site algérien TSA on pouvait lire que pour le général Ghediri, candidat à la  présidentielle, en rupture de ban, sauf quand il s’agit de « l’ouverture de frontières avec le Maroc, [celle-ci] n’est pas le point le plus important ». Ce n’est pas l’avis de la web-radio algérienne, Radio M qui estime que « c’est un sujet qui peut intégrer  la prochaine campagne présidentielle algérienne ».

Autour de l’animateur, trois Algériens, Mourad Goumiri, professeur en sciences économiques, Ferhat Ait Ali, Expert financier et Slim Othmani, fondateur et président du Think-tank CARE, ont abordé le sujet sans tabou. Pour ceux que l’intégralité du débat intéresserait, ils pourront le retrouver sur ce lien . Je retiendrai pour ma part quelques idées qui tordent le cou à certaines reçues telles que déclinées par les intervenants. D’abord « la fermeture de la frontière terrestre ne pénalise pas les flux commerciaux, le gros du trafic se faisant par voie maritime. La frontière algéro-tunisienne est ouverte mais ne fait guère mieux en termes d’échanges que le Maroc-Algérie. La fermeture pénalise donc plus d’autres volets, notamment le volet humain.

C’est vrai que le Maroc a une offre industrielle supérieure à celle qu’il avait en 1994 (date de la fermeture de frontières), mais pourquoi voir en cela un danger ? Pourquoi parle-t-on de balance commerciale qui risque de se déséquilibrer avec le Maroc ou un autre pays de l’Afrique du nord, alors que la balance commerciale de l’Algérie est quasiment déséquilibrée avec tous ses partenaires ? Comment s’ouvrir à la plus grande économie du monde (Chine) et avoir peur d’un pays comme le Maroc. La surévaluation du danger est destinée à créer volontairement une  espèce de panique (maintenez la frontière fermée sinon ils vont nous envoyer leurs hordes.) Les politiquent essaient de faire intrusion dans le domaine économique pour faire miroiter éventuellement le danger de ce voisin ou d’un autre voisin sur l’économie. Pour justifier le choix de la fermeture des frontières, on a volontairement surévalué la proximité avec le Maroc et avec le marché marocain. Alors que quand on compare la distance entre  Marseille et Alger en bateau, les distances sont autrement plus courtes.

L’évocation du trafic de la drogue se fait comme s’il est né le lendemain de la fermeture de la frontière ou comme si la consommation du cannabis est du seul fait marocain alors que sa présence est historique dans la région de l’Egypte, jusqu’à la Mauritanie. L’autre argument est que les Marocains vont profiter des produits algériens subventionnés. C’est un fait mondial dans toutes les zones frontalières. Les mitoyens iront toujours chercher chez le voisin ce qu’il a de moins cher. La fermeture n’a pratiquement aucun effet sur ces flux qui profitent aux contrebandiers. C’est connu, ’interdit, et la fermeture des frontières en est un, profite aux trafiquants qui prospèrent dans des frontières vide de tout transit humain.

Il y’a tout de même un secteur où l’économie marocaine va tirer plus de dividendes que l’économie algérienne ; le tourisme. La réponse est d’un truisme désarmant : Pourquoi les Algériens iront-ils en Tunisie ou en Turquie et pas au Maroc ? Les raisons de cet enfermement sont ailleurs et tout le monde les connait. Mais les pouvoirs ont pour expliquer cette situation une réponse hermétique  est toujours la même : vous ne savez pas. C'est-à-dire qu’on veut nous maintenir dans l’ignorance au sujet d’une prétendue stratégie, d’une prétendue doctrine caché esquelque part dans un tiroir et auquel le citoyen n’a pas droit. En réalité, géopolitiquement, il faut que les pays maghrébins et notamment l’Algérie considèrent que la prospérité et la stabilité des pays de la région est un objectif stratégique et tout ce qui peut consolider cet objectif stratégique, il faut le faire, dont l’ouverture des frontières terrestres. Leur fermeture est une hérésie  entre des Etats condamnés à un voisinage éternel.

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